Gene Wolfe - Le Nouveau Soleil de Teur. Livre 2

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Le Nouveau Soleil de Teur. Livre 2: краткое содержание, описание и аннотация

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Après bien des péripéties, voici Sévérian de retour sur Teur. Un Sévérian métamorphosé, fort de pouvoirs quasi divins et entraînant dans son sillage la Fontaine Blanche — cet objet astronomique qui est l’exact opposé d’un trou noir, un jaillissement de matière né de la semande de l’Autarque.
Mais cela suffira-t-il à redonner vie à Teur et à son soleil moribond ?
Dans cette deuxième et dernière partie de la coda imaginée par Gene Wolfe pour couronner son
, Sévérian sera le moteur de bouleversements cosmiques — un nouveau Déluge, une plongée dantesque dans les Corridors du Temps — qui, ultime révélation, lui apprendront que les sauveurs des mondes sont forcés d’en être aussi les sacrificateurs.

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« Viens, dis-je. Nous allons visiter la ville, et je t’offrirai un verre dès que le premier bloui-boui enlèvera ses grilles. »

Il ne répondit rien. Je le conduisis jusqu’à un coin qu’éclairaient les étoiles ; il avait le visage de quelqu’un qui évolue au milieu de rêves étranges.

Si je devais décrire en détail notre vagabondage, lecteur, tu mourrais certainement d’ennui ; moi, il ne m’ennuya pas. Nous suivîmes la ligne de crête des collines, en direction du nord, jusqu’à ce que nous arrêtât l’un des murs de la ville, tas de pierres en piteux état et ouvrage qui semblait avoir été autant construit par peur que par orgueil. Faisant demi-tour, nous descendîmes le long d’allées tortueuses et accueillantes, bordées de maison à colombages ; lorsque nous atteignîmes la rivière, le jour nouveau hissait un œil frais par-dessus les toits, derrière nous.

Comme nous flânions, admirant les vaisseaux aux nombreux mâts, un vieil homme, un lève-tôt ayant sans aucun doute du mal à dormir, comme c’est si souvent le cas chez les personnes âgées, nous arrêta.

« Ça alors, Zama ! s’exclama-t-il. Zama, mon garçon, on te disait mort ! »

Je ris, et au son de mon rire l’homme éveillé des morts esquissa un sourire.

Le vieil homme reprit son caquetage. « Bon sang, tu n’as jamais eu l’air aussi florissant de ta vie !

— Comment raconte-t-on qu’il est mort ? demandai-je.

— Noyé ! Le bateau de Pinian se serait échoué près de l’île Baioulo, c’est ce que j’ai entendu dire.

— A-t-il une femme ? » Quand je vis le regard curieux que m’adressait le vieil homme, j’ajoutai : « Je ne l’ai rencontré que la nuit dernière, pendant la tournée des bars, et j’aimerais bien le laisser quelque part. Il a biberonné un peu plus qu’il n’aurait fallu, j’ai bien peur.

— Non, il n’a pas de famille. Il était logé chez Pinian. La vieille femme de Pinian prélevait la pension sur sa paye. » Il m’expliqua comment m’y rendre et connaître la maison, qui semblait sordide, d’après sa description. « À mon avis je ne le ramènerais pas si tôt, alors qu’il est plein comme une barrique. Pinian va lui filer une de ces raclées… » Il secoua la tête, encore stupéfait. « Bon sang, tout le monde racontait qu’on avait repêché son corps et qu’on l’avait ramené ! »

Ne sachant pas que lui répondre, je lui dis : « On ne sait jamais ce qu’il faut croire. » Puis, ému par le ravissement que manifestait ce pauvre vieillard en voyant un jeune homme qu’il croyait mort encore en vie, je lui posai la main sur la tête et marmottai quelques phrases toutes faites lui souhaitant les meilleures choses dans cette vie et la suivante. C’était une bénédiction qu’il m’était arrivé d’employer comme autarque.

Je n’avais eu aucune intention particulière, et cependant l’effet produit fut extraordinaire. Lorsque je retirai ma main, on aurait dit que les années n’avaient été qu’une simple poussière le recouvrant et que des murs invisibles s’étaient écroulés pour laisser pénétrer le vent ; ses yeux s’ouvrirent, grands comme des soucoupes, et il tomba à genoux.

Quand nous fûmes à quelque distance de lui, je me retournai. Il était toujours agenouillé et ne nous quittait pas des yeux, mais il n’était plus un vieillard. Il n’était pas jeune pour autant ; mais simplement un homme dans son essence, un homme libéré de la spirale du temps.

Zama restait silencieux ; il passa cependant un bras par-dessus mes épaules, et j’en fis autant. C’est ainsi que nous remontâmes lentement la rue que Burgundofara et moi avions empruntée la veille, et que nous la trouvâmes en train de déjeuner avec Hadelin dans la salle publique du Chowder Pot .

CHAPITRE XXXII

En route vers l’ Alcyon

Nous n’étions attendus ni l’un ni l’autre ; aucun couvert supplémentaire n’était disposé sur la table. Je tirai une chaise pour moi-même, puis, voyant qu’il restait debout, l’œil fixe, une autre pour Zama.

« Nous pensions que vous étiez parti, s’gneur », s’excusa Hadelin. Son visage et celui de Burgundofara disaient assez où celle-ci avait passé la nuit.

« J’étais bien parti, répondis-je m’adressant à elle et non à lui. Je vois pourtant que tu es revenue dans notre chambre prendre tes vêtements.

— Je te croyais mort », protesta Burgundofara. Comme je ne réagissais pas, elle ajouta : « Je pensais que cet homme t’avait tué. L’entrée de la chambre était obstruée par un tas de trucs que j’ai dû pousser, et on avait cassé les volets pour les ouvrir.

— Quoi qu’il en soit, vous êtes de retour, s’gneur. » Hadelin échoua dans sa tentative pour paraître joyeux. « Toujours partant pour notre croisière ?

— Peut-être. Lorsque j’aurais vu votre bateau.

— Alors vous viendrez, s’gneur, je pense. » L’aubergiste fit son apparition, un sourire forcé aux lèvres, multipliant les courbettes. Je remarquai un couteau de boucher glissé dans sa ceinture, sous son tablier de cuir.

« Des fruits pour moi, dis-je. Vous vous êtes vanté d’en avoir, hier au soir. Apportez-en aussi à cet homme. Nous verrons s’il en mange. Maté pour tous les deux.

— Immédiatement, s’gneur.

— Quand nous aurons mangé, nous irons ensemble dans ma chambre. Il y a eu des dégâts, et nous en estimerons le montant.

— Ce ne sera pas nécessaire, s’gneur. Une bagatelle ! Peut-être serez-vous d’accord pour un remboursement symbolique d’un orichalque ? » Il essayait de se frotter les mains comme certaines personnes le font souvent, mais leur tremblement rendait son geste ridicule.

« Je dirais plutôt cinq ou dix. Une porte démolie, un mur endommagé, un lit bon à mettre au feu. Vous et moi irons faire cette estimation. »

Ses lèvres tremblaient également ; je trouvai soudain qu’il n’y avait plus rien d’agréable à terrifier le petit homme, tout de même venu avec sa lanterne et son bâton quand l’un de ses clients était attaqué. « Vous ne devriez pas boire autant », lui dis-je, touchant ses mains.

Il sourit et pépia : « Merci s’gneur. » Et il s’éloigna en trottinant.

Tous étaient tropicaux, comme je m’y attendais ; bananes, plantains, oranges, mangues et bananes, amenés des terres lointaines par des convois de bêtes de somme. Il n’y avait ni raisin ni pommes. J’empruntai le couteau qui avait frappé Zama pour peler une mangue et nous mangeâmes en silence. Au bout de quelques instants Zama prit également quelque chose, ce qui me parut un bon signe.

« Quelque chose d’autre, s’gneur ? demanda l’aubergiste, à mes côtés. Nous sommes bien approvisionnés. »

Je secouai la tête.

« Alors peut-être… ? » fit-il avec un mouvement de tête vers l’escalier. Je me levai, faisant signe aux autres de ne pas bouger.

« Tu aurais dû le laisser avec sa frousse, dit Burgundofara. Cela t’aurait coûté moins cher. » L’aubergiste lui jeta un regard de haine pure.

Son établissement, qui m’avait paru petit la veille, alors que j’étais recru de fatigue et que l’enveloppaient les ténèbres, était en réalité minuscule ; il comportait quatre pièces, pas davantage, par niveau. La chambre elle-même, qui m’avait paru suffisamment spacieuse lorsque je gisais sur le matelas, à l’écoute de Zama allant et venant, était à peine plus grande que la cabine que Burgundofara et moi avions partagée sur la navette. La hache de Zama, vieille, usée, un simple instrument de bûcheron, était jetée dans un coin.

« Je ne voulais pas que vous veniez et avoir l’air de vous extorquer de l’argent, s’gneur, se défendit l’aubergiste. Ni pour ceci, ni pour cela, jamais. »

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