Et ensuite ?
La vague déferlerait parmi les milieux politiques et les médias. Des accusations, des reproches seraient lancés. Le processus engagé à Stormont, encore une fois, se trouverait menacé. Ou bien, les gouvernements britannique et irlandais accepteraient d’autres concessions afin d’empêcher la dissolution de l’Assemblée. L’Union européenne enverrait des fonds supplémentaires destinés à calmer la population de Belfast. Peut-être les Anglais tenteraient-ils de rejeter la faute sur les dissidents ; lesquels, du reste, ne recueilleraient aucun soutien.
Alors, qu’adviendrait-il ? Fegan l’ignorait. Il savait seulement que le pays n’avait plus la force, ni le désir, de continuer la guerre. Cette soif-là était étanchée depuis longtemps. Les hommes comme lui ne servaient à rien maintenant. Il se sentait épuisé, submergé par une noirceur sans fin.
Il n’y avait pas d’émotion dans les yeux de Marie. Son visage restait fermé, dur comme la pierre. « Où comptez-vous aller ? demanda-t-elle.
— Je n’en ai aucune idée. » Quand bien même il l’aurait su, Fegan n’aurait pas répondu. « Loin d’ici. Je ne reviendrai pas. Jamais. »
Elle hocha la tête. L’espace d’une seconde, elle laissa tomber son masque et se pencha pour l’embrasser sur les lèvres. Un baiser fugace, tiède, dont l’empreinte s’évanouit aussitôt dans le froid du matin. Marie ouvrit la portière du conducteur.
« Si je vous revois ici, je vous dénoncerai. Sans la moindre hésitation. »
Fegan regarda Ellen endormie. Il savait combien sa présence les mettrait en danger, elle et sa mère.
« Je comprends, dit-il. Mais juste une chose…
— Quoi ? »
Il sortit le téléphone de sa poche. L’appareil portait encore des traces de sang. « Si quelqu’un vous menace, si vous avez peur… Vous savez où me trouver. »
Était-ce un sourire qui s’ébaucha sur les lèvres de Marie ? L’espoir d’un sourire… Ce fut si bref qu’il n’aurait pu l’affirmer.
Les marins chinois ramassèrent l’argent sur la Clio et firent signe à Fegan de les suivre. Il rangea le téléphone, se retourna une dernière fois. Marie prenait déjà place au volant.
« Vite ! Venez ! dit l’un des hommes. C’est l’heure. »
Ellen s’éveilla au son de la portière qui claquait et regarda Fegan en se frottant les yeux. Il agita la main. La fillette lui répondit par un geste identique. Il ramassa son sac, puis partit vers les bateaux. Les mouettes tournoyaient dans le ciel au-dessus de l’entrepôt. Sur son visage, la pluie répandait une onde de fraîcheur.
Il n’y avait plus personne derrière lui. Seulement son ombre.
Bien des gens m’ont soutenu jusqu’à la parution de cet ouvrage, mais je souhaite exprimer plus particulièrement ma gratitude à certains d’entre eux :
Mon agent, Nat Sobel, et tous les membres de Sobel Weber Associates, Inc, qui m’ont permis de vivre ce bonheur exceptionnel. Nat, je ne pourrai jamais assez te témoigner ma reconnaissance.
Caspian Dennis, et tous les membres de Abner Stein Ltd pour leur excellent travail.
Geoff Mulligan, Briony Everroad et tous les membres de Harvill Secker pour leur expérience professionnelle et la gentillesse dont ils ont fait preuve en réponse à mes questions.
Laura Hruska, chez Soho Press, pour le pari incertain qu’elle a osé prendre.
Betsy Dornbusch, qui m’a accordé sa confiance, son amitié et ses encouragements, sans lesquels ce livre n’aurait pu voir le jour.
Shona Snowden, pour son œil acéré et ses excellentes critiques.
Josephine Damian, pour son enthousiasme et son soutien.
Juliet Grames, pour ses sages conseils.
Mon attachée de presse, Hilary Knight, pour avoir fait passer le message.
Declan Burke et Gerard Brennan, pour leur soutien à la cause.
Les participants actifs à divers forums d’auteurs, qui m’ont prodigué amitié, soutien et conseils. Je ne peux ici les citer tous, mais parmi eux : Adrian McKinty, Chris F. Holm, Cindy Pon, Ellen Oh, Jeremy Duns, J.J. De Benedictis, Moonrat et Nathan Bransford. Avec une mention particulière pour Miss Snark, quelle que soit sa véritable identité ; grâce à ses constantes exhortations, certains d’entre nous ont réussi à franchir la barrière.
Mes amis et ma famille pour… inutile d’expliquer.
UDR (régiment pour la défense de l’Ulster) : force militaire de sécurité intérieure mise en place en Irlande du Nord par le gouvernement britannique à partir de 1970. (Toutes les notes sont de la traductrice.)
RUC (police royale d’Ulster) : police nord-irlandaise de 1922 à 2001, à qui on a souvent reproché son recrutement essentiellement protestant ou unioniste.
UFF (combattants pour la liberté de l’Ulster) : organisation paramilitaire unioniste, née en 1973, qui s’est signalée très tôt par sa violence anti-catholique.
Château de Belfast qui accueille le siège de l’Assemblée nord-irlandaise depuis le 10 avril 1998, ainsi qu’un cabinet gouvernemental dirigé par un Premier ministre d’Irlande du Nord. Nationalistes et unionistes s’y partagent le pouvoir.
L’accord du Vendredi saint, ou accord de Belfast, officiellement Accord de paix pour l’Irlande du Nord, fut signé le 10 avril 1998 par les principales forces politiques d’Irlande du Nord acceptant une solution politique pour mettre fin à trente années d’un conflit sanglant (aussi appelé « Les Troubles »), de 1969 à 1998.
La plus ancienne et la plus populaire chaîne de télévision d’Irlande.
PSNI : Police Service of Northern Ireland. Service de police qui a remplacé la RUC (Royal Ulster Constabulary) en 2001, tout en conservant les mêmes véhicules blindés.
À partir de 1971, la loi sur l’ internment permet à l’armée britannique d’arrêter les suspects et de les interner dans des camps sans procès. Le recours à l’emprisonnement de façon abusive suscitera de nombreux conflits.
Special Air Service. Unité de forces spéciales de l’armée britannique, engagées contre les indépendantistes irlandais à partir des années 1970.
Branche médiatrice qui enquête sur les plaintes déposées contre les agents de police.
Holylands : « terres saintes ». Quartier de Belfast.
Plumet rouge porté sur le béret par les membres du Black Watch (bataillon d’infanterie du Régiment royal d’Écosse).
14 Intelligence Company, ou « 14 INT » ou « The Det » pour « The Detachment ». Unité de renseignement créée en 1972 pour exécuter des missions de surveillance et de reconnaissance de proximité face aux combattants armés de l’IRA.
L’Irlande est traditionnellement divisée en quatre provinces (Leinster, Munster, Connacht, Ulster). Sur les neuf comtés d’Ulster, six forment l’Irlande du Nord, qui est considérée comme une province par le Royaume-Uni, ce qui prête à confusion.
Bull : taureau.
Criminal Investigation Department (Brigade criminelle).
Her Majesty.
Ulster Volunteer Force, Ulster Defence Association : groupes paramilitaires protestants unionistes créés pour lutter contre l’IRA.