Gérard Villiers - La taupe de Langley
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- Название:La taupe de Langley
- Автор:
- Издательство:Éditions Gérard de Villiers
- Жанр:
- Год:1988
- Город:Paris
- ISBN:2-7386-0001-8
- Рейтинг книги:3 / 5. Голосов: 1
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Cinq minutes plus tard, ils se glissaient dans le garage, soulevaient la porte métallique et sortaient.
La nuit était tiède, le ciel piqueté d’étoiles et le silence presque absolu.
Le bungalow voisin du leur était vide maintenant, lui aussi. Flor sortit de son sac un gros « 357 Magnun » nickelé et le garda à la main.
Ils remontèrent l’allée. Toutes les portes des garages étaient ouvertes, sauf une. Ils en firent le tour, tombant sur un carré de lumière : un vasistas dont le volet était resté ouvert. Malko se hissa sur la pointe des pieds et aperçut un moustachu ventripotent en train de s’agiter sur une mince pute à la robe retroussée qui regardait le plafond en poussant des grognements syncopés. Ils redescendirent la rangée suivante et passèrent devant la cabane du gérant. Il lisait, les pieds sur la table.
— Lui doit savoir, remarqua Malko.
— Il ne dira rien, dit Flor. Il aura peur. Le motel appartient au colonel.
Il restait deux bungalows occupés. Malko examina les vasistas : aucune lumière à l’intérieur. Les garages étaient impossibles à ouvrir de l’extérieur. Il hésitait sur la conduite à tenir, quand Flor remarqua à voix basse :
— Quelquefois, les gens qui viennent le soir restent dormir. On ne leur dit rien car il n’y a pas de clients la nuit. Il faut revenir demain matin. Celui qui restera fermé sera celui du señor Kramer.
Le défecteur de la CIA pouvait être armé, Malko ne tenait pas à engager une bataille dans l’obscurité… Il se rangea à l’avis de Flor Mochis.
Ils regagnèrent le bungalow et remontèrent dans la Colt.
— J’ai faim, dit Flor.
— Allons dîner, proposa Malko. Tu connais un endroit ?
— Oui, le Toledoy un restaurant espagnol, juste à côté du « Capitolio [19] Le palais présidentiel.
».
Pendant qu’il roulait sur l’avenida de Las Americas déserte, elle se remaquilla et se recoiffa. Lorsqu’ils arrivèrent au restaurant, dans le quartier résidentiel de l’ancienne clique de Trujillo, à part les yeux cernés, elle était impeccable, le feutre noir bien droit sur la tête.
Le rouge du Chili tapait fort et Malko se sentait la tête lourde. Il en savait un peu plus sur Flor. Elle gagnait huit cents pesos par mois, était divorcée et espérait un jour émigrer aux États-Unis. En attendant, elle arrivait à mener une vie décente grâce aux primes de Jim Harley. Parfois au risque de sa vie, car les narcotraficantes ne plaisantaient pas. C’est la raison pour laquelle il y avait le « 357 Magnum » dans son sac. Malko la ramena à sa voiture.
Elle lui fit face, les yeux brillants et dit de sa voix rauque :
— J’espère que tu auras encore besoin de moi… Quand je pense à tout à l’heure, cela me brûle là.
Sa main était posée entre ses cuisses. Pour la première fois, ils s’embrassèrent. Violemment, entrechoquant leurs dents. Quand elle eut repris son souffle, elle lui dit soudain :
— Demain matin, je préfère que tu ailles seul. Il ne faut pas qu’on me voie.
Il comprit soudain pourquoi elle l’avait dissuadé de parler au gardien.
— Nous pouvons dîner ensemble demain soir, proposa Malko. Viens me chercher au Sheraton .
— D’accord, après nous irons danser, dit-elle.
Elle sauta de la voiture et se dirigea vers son tas de boue, pendant que Malko faisait demi-tour. Il y eut une pétarade bruyante, un nuage de fumée puis le couinement désespéré d’un démarreur tournant dans le vide. Malko revint en marche arrière. Flor le héla.
— Raccompagne-moi, elle ne veut pas partir, je m’en occuperai demain matin.
Cinq minutes plus tard, il la déposait devant une masure en bois de la calle Las Damas. Elle lui adressa un dernier soupir sensuel et carnassier.
— Hasta luego .
Malko traversa le hall désert du Sheraton . Les clefs de Chris et de Milton se trouvaient dans la case, donc les deux gorilles étaient sortis. Il prit la sienne, se demandant ce qu’il allait faire de Paul Kramer, après l’avoir retrouvé.
Aucun moyen légal de l’entraîner hors du pays. Il fallait le convaincre ou le kidnapper. Deux possibilités également délicates… Un vacarme incroyable montait du Malecon fermé à la circulation pour une sorte de kermesse populaire.
À peine était-il dans sa chambre que son téléphone sonna.
— Mister Linge ? Malko Linge ?
C’était une voix un peu tendue incontestablement américaine.
— Oui, dit Malko.
— Je suis Paul Kramer. Il faut que je vous voie tout de suite, je suis en danger.
Chapitre VIII
Malko demeura muet de stupéfaction quelques instants. Il s’attendait à tout, sauf à cela. D’abord, il fallait être certain qu’il s’agissait bien de l’Américain.
— Donnez-moi votre numéro d’immatriculation de la CIA, dit-il.
Paul Kramer récita les huit chiffres sans hésiter. Malko prit le dossier et les vérifia. C’étaient les bons. Paul Kramer enchaîna, d’une voix pressante :
— Je n’ai pas le temps de répondre à vos questions. On m’a enfermé, j’ai pu me libérer. Mais ils me cherchent.
— Qui ?
— Ceux qui me gardent. Des Cubains et des gens d’ici.
— Où êtes-vous ?
— Je me cache… dans l’ancienne Feria Ganaderia désaffectée en bordure de l’autopista 30 de Mayo. Vers le kilomètre onze. Juste en face, il y a un monument à la mémoire de Raphaël Trujillo. Arrêtez-vous à côté et donnez trois coups de phare. Je vous rejoindrai.
— Pourquoi vous êtes-vous enfui ?
— Je vous expliquerai plus tard. Venez vite.
Il raccrocha, laissant Malko perplexe. Que signifiait ce nouveau développement ? Apparemment, le tuyau de Flor Mochis était crevé. L’endroit où il avait rendez-vous était à l’opposé du motel Cabanas por el Mar . Ce coup de fil était plus que suspect. Mais il ne pouvait pas ne pas aller au rendez-vous. Il appela sans succès les chambres de Chris et Milton. Et il n’avait même pas une arme !
Il descendit, traversa le hall désert, inspecta la salle de jeux, en face. La fête continuait sur le Malecon. Où étaient passés les deux gorilles ? Furieux, il revint dans le hall, essaya le Raffles . Une voix espagnole lui dit que le señor Jim était sorti. Il appela le numéro personnel de Henry Fairmont. Pas de réponse. Et le temps s’écoulait. Sautant dans sa Colt, il s’engagea dans l’avenida Independencia.
Espérant que Flor Mochis n’était pas ressortie.
L’escalier branlant sentait le poisson et la crasse. Malko craqua une allumette et inspecta les boîtes aux lettres. Sur l’une d’elles, une inscription à l’encre rouge indiquait : F. Mochis. Primero . Au milieu de craquements du bois pourri, il monta jusqu’au palier, frappa à la porte où une carte de visite était épinglée. Il frappait encore quand une porte s’ouvrit brutalement, dans son dos. Il n’eut même pas le temps de se retourner. Le canon d’une arme s’enfonçait violemment dans sa nuque, le projetant contre le mur.
— Ne bouge pas, lagarto !
Flor Mochis était toujours aussi douce.
— C’est moi, Malko.
L’arme se décolla de sa nuque, il fît demi-tour, ébloui par le faisceau d’une torche électrique, aperçut Flor vêtue d’un long T-shirt, les cheveux défaits, pieds nus dans des escarpins, son « 357 Magnun » nickelé au poing.
— Qu’est-ce qui se passe ? demanda-t-elle.
Malko le lui expliqua, sans même qu’elle le fasse entrer. Sa réaction fut rapide et brutale.
— C’est un piège, mais il faut aller voir. Attends-moi.
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