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Gérard De Villiers: Magie noire à New York

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Gérard De Villiers Magie noire à New York

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— Mais je vous dis…

— Je ne suis pas obligé de vous croire. J’ai des ordres du capitaine. Il m’a dit : « Laisse tomber. » Je laisse tomber.

Malko comprit qu’il n’aurait pas gain de cause.

— Retenez-le au moins quelques minutes, supplia-t-il. Et prévenez le FBI.

— C’est en train de se faire, assura le flic. Le capitaine s’en occupe.

Il descendit de la voiture et se dirigea droit sur Janos Ferenczi.

— Vous êtes libre, sir, dit-il. À condition de me laisser votre passeport. Il faudra vous présenter à l’Immigration pour le récupérer.

Poliment, Ferenczi tendit son passeport avec un sourire :

— Merci, je sais que dans ce pays, vous respectez la liberté individuelle. Je vous félicite.

Le policier salua sans répondre. Janos Ferenczi, les mains dans ses poches, franchit les guichets et s’éloigna à grandes enjambées. Il y avait une station de métro à cent mètres. Une seconde, Malko songea à s’emparer de l’arme d’un des policiers et à tirer sur lui. Mais il serait transformé en passoire avant d’avoir eu le temps de presser la détente.

Janos Ferenczi allait droit à l’appartement de Sabrina détruire les preuves et faire disparaître la jeune femme. Et cette fois, il n’y aurait plus personne pour innocenter Malko…

Le capitaine Pavel Andropov et les deux autres Russes furent enfournés à l’arrière de la voiture de police. Les policiers avaient inspecté entièrement la Ford verte et découvert les appareils à photocopier, ce qui les laissait plutôt perplexes.

Malko se rongeait les ongles d’impatience. Trois quarts d’heure passèrent. Janos Ferenczi avait eu dix fois le temps de liquider Sabrina, ou de la faire disparaître.

Soudain, le Queen’s Midtown Tunnel retentit du son lugubre d’une sirène. Une Lincoln noire jaillit du tunnel comme une fusée, un feu rouge clignotant frénétiquement derrière son pare-brise.

La voiture stoppa près de celle des policiers. Deux hommes en descendirent en même temps. Deux armoires à glace, vêtues de la même façon : costume gris en dacron, feutre à bords étroits, et chemise au col boutonné.

Malko poussa une exclamation de surprise. C’était les deux gorilles de la CIA avec qui il avait souvent travaillé : Milton Brabeck et Chris Jones [23] SAS à Istanbul, SAS Caraïbes. . Deux durs qui valaient une division de Marines. Ils ne s’étaient plus revus depuis leur mission en Sardaigne de l’été précédent [24] SAS à l’Ouest de Jérusalem . .

Chris Jones serra la main de Malko. Mais ses yeux bleu-gris n’avaient pas une expression aussi chaleureuse que d’habitude. Milton Brabeck se contenta d’un signe de tête.

— Comment êtes-vous ici ? demanda Malko.

Chris répondit sans le regarder :

— On vous expliquera. Qu’est-ce qui se passe ?

Malko désigna la voiture de patrouille.

— Vous avez là trois Russes appartenant à un réseau clandestin. Un quatrième est en fuite. Il faut le rattraper d’urgence, sinon il va supprimer un témoin ou le faire disparaître.

Le gorille hocha la tête.

— On y va.

Les policiers regardaient avec respect la Lincoln Continental. Ce n’est pas dans la police municipale qu’on leur donnerait des voitures de huit mille dollars. Chris Jones eut un bref conciliabule avec le sergent Al Moore. Les trois suspects allaient être conduits au FBI immédiatement.

— C’est vous qui avez laissé filer le quatrième ? demanda Jones au sergent Moore.

— C’est la loi, fit l’autre sentencieusement.

Le gorille grinça des dents :

— Si vous continuez à l’appliquer comme ça, mon vieux, vous vous préparez un beau job de tondeur de gazon…

Sur ces paroles vengeresses, il remonta dans la Lincoln. Malko s’installa à l’avant entre les deux hommes. La voiture fit un demi-tour où elle laissa la moitié de ses pneus et replongea dans le tunnel, à tombeau ouvert.

Les cavaliers de l’Apocalypse.

— Voulez-vous m’expliquer… commença Malko.

Chris Jones eut un sourire triste.

— On vous cherchait. Depuis cinq jours. Mais on ne voulait pas le dire devant ces abrutis.

Malko sursauta.

— Vous m’arrêtez ?

L’autre secoua la tête.

— Non. Nous avons l’ordre de rester avec vous tant que tout n’est pas absolument éclairci. Mais le FBI a quand même lancé un avis de recherches pour vous retrouver depuis que vous avez faussé compagnie à leur petit camarade…

— C’est une longue histoire…

Chris Jones l’arrêta d’un geste :

— On sait. M. Wise a reçu votre lettre de Vienne. On ne demande qu’à vous croire. Où en êtes-vous ?

Pendant que la Lincoln dévalait le tunnel, Malko résuma la situation.

— Il faut demander l’aide du FBI, conclut-il. Pour retrouver Janos Ferenczi coûte que coûte, et Sabrina.

— Tous les gars des Domestic Opérations sont sur le coup pour vous, dit Chris Jones. On va les avertir. Et le FBI aussi.

L’immeuble contenant la centrale des Domestic Opérations se trouvait à Washington, 1750, Pensylvania Avenue, à deux pas de la Maison-Blanche. La CIA n’ayant pas le droit d’opérer sur le territoire des USA, cette centrale n’avait aucune existence légale – La Lincoln que conduisait Chris Jones était pourtant immatriculée au nom d’une société fantôme domiciliée 1750, Pensylvania Avenue. Ils émergeaient du tunnel.

Chris Jones prit le micro, dissimulé sous le luxueux tableau de bord, changea de fréquence et annonça :

— Ici, Jones. 6-4-7-9. Nous avons retrouvé SAS. Il faut protéger d’urgence une femme qui habite 425, East 52, appartement 2 B. Nom encore inconnu. Que personne, je dis, personne, ne puisse l’approcher. Retenez quiconque tentera d’entrer en contact avec elle.

Malko s’écria :

— Chris, il va être midi. Avec le trafic, ils ne pourront jamais y être à temps.

Le gorille sourit finement.

— Ils y vont en chopper[25] Hélicoptère.. Seront là-bas avant nous. Ils attendent sur le building de la Panam.

Effectivement quand ils arrivèrent au 425 de la 52 eRue, cinq hommes du FBI étaient déjà là. L’hélicoptère les avait tout simplement déposés sur le toit de l’immeuble. En trois minutes. À son micro, Chris Jones diffusa le signalement de Janos Ferenczi avant de rejoindre Malko et Milton dans le hall.

Le portier, qui avait été chercher un taxi pour Malko, eut un haut-le-corps en l’apercevant :

— Mais je connais ce type-là, glapit-il. Il a voulu…

Chris Jones l’arrêta :

— C’est notre patron. Vous avez quelque chose à dire ?

Puis il se tourna vers les agents du FBI.

— Où est la fille ?

— Pas dans l’appartement, répondit l’autre. Nous avons tout fouillé. Deux gars de chez nous y sont en permanence.

— Personne ne l’a demandée ?

— Personne, sauf un coup de téléphone. On a raccroché tout de suite, sans rien dire.

— Vous avez des hommes partout ? demanda Malko.

— Jusque dans le vide-ordures.

Tout ce déploiement de force ne servait à rien tant qu’on ignorait où se trouvait Sabrina. Malko eut une inspiration :

— Allons à l’appartement.

Ils montèrent avec Chris et Milton. Les hommes du FBI leur ouvrirent. Le cœur battant, Malko alla au meuble d’où Martin avait sorti le masque de caoutchouc. L’objet n’avait pas bougé.

Il le sortit et le tendit à Chris Jones :

— Gardez cela comme un billet de mille dollars. C’est la première preuve que je ne suis ni fou, ni traître…

Déployant le masque, il expliqua au gorille de quoi il s’agissait. Chris Jones siffla d’admiration :

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