Уильям Шекспир - Henri IV (2e partie)
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William Shakespeare
Henri IV (2e partie)
TRAGÉDIE
DEUXIÈME PARTIE
Henri V est le véritable héros de la seconde partie; son avénement au trône et le grand changement qui en résulte sont l'événement du drame. La défaite de l'archevêque d'York et celle de Northumberland ne sont que le complément des faits contenus dans la première partie. Hotspur n'est plus là pour donner à ces faits une vie qui leur appartienne, et l'horrible trahison de Westmoreland n'est pas de nature à fonder un intérêt dramatique. Henri IV mourant ne se montre que pour préparer le règne de son fils, et toute l'attention se porte déjà sur un successeur également important par les craintes et par les espérances qu'il fait naître.
Ce n'est pas tout à fait à l'histoire que Shakspeare a emprunté le tableau de ces divers sentiments. L'avénement de Henri V fut généralement un sujet de joie: Hollinshed rapporte que, dans les trois jours qui suivirent la mort de son père, il reçut de plusieurs «nobles hommes et honorables personnages,» des hommages et serments de fidélité tels que n'en avait reçu aucun des rois ses prédécesseurs 1 1 Chroniques de Hollinshed, t. II, p. 543.
, «tant grande espérance et bonne attente avait-on des heureuses suites qui par cet homme devaient advenir.» L'inconstante ardeur des esprits, entretenue par de fréquents bouleversements, faisait nécessairement d'un nouveau règne un sujet d'espérances; et les troubles qui avaient agité le règne de Henri IV, les cruautés qui en avaient été la suite, les continuelles méfiances qui devraient en résulter, portaient naturellement la nation à tourner les yeux vers un jeune prince dont, en ce temps de désordre, les déréglements choquaient beaucoup moins que ses qualités généreuses n'inspiraient de confiance. On attribuait d'ailleurs une partie de ces déréglements à la méfiance jalouse de son père, qui, en le tenant écarté des affaires auxquelles il se portait avec une grande ardeur, en lui ôtant même l'occasion de faire éclater ses talents militaires, avait jeté cet esprit impétueux dans des voies de désordre où les moeurs du temps ne permettaient guère qu'on s'arrêtât sans avoir atteint les derniers excès. Hollinshed attribue à la malveillance de ceux qui entouraient le roi Henri IV, non-seulement les soupçons qu'il était disposé à concevoir contre son fils, mais encore les bruits odieux répandus sur la conduite de ce prince. Il rapporte une occasion où le prince, ayant à se défendre contre certaines insinuations qui avaient mis la mésintelligence entre son père et lui, se rendit à la cour avec une suite dont l'éclat et le nombre n'étaient pas faits pour diminuer les soupçons du roi, et dans un costume assez singulier pour que le chroniqueur ait cru devoir en faire mention. C'était «une robe ( a gowne , probablement un long manteau) de satin bleu remplie de petits trous en façon d'oeillets, et à chaque trou pendait à un fil de soie l'aiguille avec laquelle il avait été cousu.» Quoi qu'on puisse penser de la gêne des mouvements d'un homme vêtu d'une manière si inquiétante, le prince se jeta aux pieds de son père, et, après avoir protesté de sa fidélité, lui présenta son poignard, afin qu'il se délivrât de ses soupçons en le tuant, «et en présence de ces lords, ajouta-t-il, et devant Dieu au jour du jugement, je jure ma foi de vous le pardonner hautement.» Le roi attendri, jeta le poignard, embrassa son fils les larmes aux yeux, lui avoua ses soupçons, et déclara en même temps qu'ils étaient effacés. Le prince demanda la punition de ses accusateurs; le roi répondit que la prudence exigeait quelques délais, et ne punit point. Mais il paraît que l'opinion générale vengeait suffisamment le jeune prince; et sans croire précisément avec Hollinshed, qui d'ailleurs se contredit sur ce point, que Henri ait toujours eu soin «de contenir ses affections dans le sentier de la vertu», on est porté à supposer quelque exagération dans le récit des déportements de sa jeunesse rendus plus remarquables par la révolution subite qui les a terminés, et par l'éclat de gloire qui les a suivis.
Shakspeare devait naturellement adopter la tradition la plus favorable à l'effet dramatique; il a senti aussi combien le rôle d'un roi et d'un père mourant, inquiet sur l'avenir de son fils et de ses sujets, était plus propre à produire sur la scène un tableau touchant et pathétique; et de même qu'il a inventé pour la beauté de son dénoûment l'épisode de Gascoygne, il a ajouté, à la scène de la mort de Henri IV, des développements qui la rendent infiniment plus intéressante. Hollinshed rapporte simplement que le roi s'apercevant qu'on avait ôté sa couronne de dessus son chevet, et apprenant que c'était le prince qui l'avait emportée, le fit venir et lui demanda raison de cette conduite: «Sur quoi le prince, avec un bon courage, lui répondit: – Sire, à mon jugement et à celui de tout le monde, vous paraissiez mort. Donc, comme votre plus proche héritier connu, j'ai pris cette couronne comme mienne et non comme vôtre. – Bien, mon fils, dit le roi avec un grand soupir, quel droit j'y avais, Dieu le sait! – Bien, dit le prince, si vous mourez roi, j'aurai la couronne, et je me fie de la garder avec mon épée contre tous mes ennemis, comme vous avez fait. – Étant ainsi, dit le roi, je remets tout à Dieu et souvenez-vous de bien faire. Ce que disant, il se tourna dans son lit, et bientôt après s'en alla à Dieu.» Peut-être la réponse du jeune prince, rendue comme un poëte l'eût su rendre, aurait-elle été préférable au discours étudié que lui prête Shakspeare; cependant il en a conservé une partie dans la dernière réplique du prince de Galles, et le reste de la scène offre de grandes beautés, ainsi que celles qui suivent entre Gascoygne et les princes. En tout, Shakspeare paraît avoir voulu racheter par des beautés de détail la froideur nécessaire de la partie tragique; elle en offre beaucoup, et le style en est généralement plus soigné et plus exempt de bizarrerie que celui de la plupart de ses autres pièces historiques.
La partie comique, très-importante et très-considérable dans cette seconde partie de Henri IV , n'est cependant pas égale en mérite à ce qu'offre, dans le même genre, la première partie. Falstaff est parvenu, il a une pension, des grades; ses rapports avec le prince sont moins fréquents; son esprit ne lui sert donc plus aussi fréquemment à se tirer de ces embarras qui le rendaient si comique; et la comédie est obligée de descendre d'un étage pour le représenter dans sa propre nature, livré à ses goûts véritables et au milieu des misérables dont il fait sa société, ou des imbéciles qu'il a encore besoin de duper. Ces tableaux sont sans doute d'une vérité frappante et abondent en traits comiques, mais la vérité n'est pas toujours assez loin du dégoût pour que le comique nous trouve alors disposés à toute la joie qu'il inspire; et les personnages sur qui tombe le ridicule ne nous paraissent pas toujours valoir la peine qu'on en rie. Cependant le caractère de Falstaff est parfaitement soutenu, et se retrouvera tout entier quand on le verra reparaître ailleurs.
La seconde partie de Henri IV a paru, à ce qu'on croit, en 1598; avant cette époque, on représentait sur la scène anglaise une pièce intitulée les Fameuses Victoires de Henri V , sorte de farce tragi-comique dépourvue de tout mérite. Rien ne pourrait mieux faire comprendre que ce vieux drame la merveilleuse transformation qu'opéra Shakspeare dans les représentations théâtrales du siècle d'Elisabeth.
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