- D’après nos informations, vous étiez chez Clark Manners la nuit où Christine a été tuée, commença Mackenzie. Que pouvez-vous nous raconter à propos de cette soirée ?
- Nous nous sommes juste retrouvés pour passer un bon moment. Nous avons un peu bu – peut-être trop. Nous avons joué à des jeux de cartes, regardé des rediffusions de The Office, et c’est à peu près tout.
- Y a-t-il eu des disputes, de quelque type que ce soit ? demanda Mackenzie.
- Non. Mais j’ai remarqué que Christine commençait à être énervée à cause de Clark. Parfois, quand il boit, il tend à pousser le bouchon trop loin, vous savez ? Elle n’a rien dit ce soir-là, mais elle était irritée, c’était évident.
- Savez-vous si cela a déjà causé des problèmes entre eux par le passé ?
- Pas que je sache. Je crois que Christine passait outre. Je suis à peu près sûre qu’elle n’avait pas l’intention de rester avec Clark pour toujours.
- Bethany, connaissez-vous une jeune femme appelée Jo Haley ? D’à peu près votre âge, étudiante à Queen Nash ?
- Oui. Pas aussi bien que je connaissais Christine, mais je l’appréciais. Je n’irais pas jusqu’à la décrire comme une amie, mais si on se croisait dans un bar ou autre, on terminait généralement par s’asseoir ensemble et discuter.
- Je suppose que vous savez qu’elle a été assassinée il y a quelques jours ? demanda Ellington.
- Oui. C’est d’une ironie cruelle, mais c’est Christine qui m’a appris la nouvelle.
- Savez-vous d’où elle la tenait ?
- Aucune idée. Je crois qu’elles avaient plusieurs cours en commun. Oh, et le même conseiller de parcours pédagogique, aussi.
- Conseiller de parcours pédagogique ? lança Ellington. Est-ce une manière alambiquée de désigner le conseiller d’orientation ?
- Plus ou moins, répondit Bethany.
- Êtes-vous certaine que Jo et Christine étaient suivies par la même personne ? insista Mackenzie.
- C’est ce que Christine m’avait dit. Elle l’a mentionné en m’apprenant la mort de Jo. Elle m’a dit qu’elle l’avait vécue comme une attaque personnelle.
Bethany s’interrompit, mesurant peut-être le poids inquiétant et prémonitoire de ce commentaire pour la première fois.
- Connaîtriez-vous par hasard le nom de ce conseiller ? continua Mackenzie.
Bethany réfléchit quelques instants avant de secouer la tête.
- Désolée. Non. Elle y a fait allusion quand nous parlions de Jo mais je ne m’en souviens pas.
Peu importe, songea Mackenzie. Un appel rapide à l’université nous apportera cette information.
- Y a-t-il autre chose que vous pourriez nous dire au sujet de Jo ou de Christine ? demanda Mackenzie. Quelque chose qui puisse expliquer que quelqu'un ait souhaité leur mort ?
- Absolument rien. Ça n’a aucun sens. Christine était très concentrée sur ses études, elle ne faisait pas de vagues. Elle bossait beaucoup en vue de commencer sa carrière le plus tôt possible. Mais je ne connaissais pas assez bien Jo pour avoir une opinion.
- Eh bien, merci pour votre temps, dit Mackenzie.
Alors qu’ils sortaient du bureau et que Bethany se préparait à rentrer chez elle, Mackenzie tenta d’imaginer les deux jeunes femmes assassinées se croiser dans les couloirs de l’université. Elles s’étaient peut-être croisées lorsque l’une sortait d’un rendez-vous avec son conseiller de parcours pédagogique et que l’autre entrait dans son bureau. Cette idée donnait la chair de poule mais elle ne savait que trop que de telles choses survenaient souvent dans les affaires de meurtres lorsqu’il y avait plus d’une victime.
- Les bureaux de l’université sont encore fermés à cause des vacances, lui fit remarquer Ellington alors qu’ils remontaient dans la voiture. Je suis sûr qu’ils rouvriront leurs portes demain.
- Ouais, mais je serais prête à parier qu’il y a une sorte de répertoire des employés sur internet. D’après les livres que j’ai vus dans l’appartement de Christine et les tracts politiques dans sa chambre, je pense que nous pouvons affirmer sans nous tromper qu’elle étudiait les sciences politiques. On pourrait restreindre les possibilités grâce à cette information.
Avant qu’Ellington ait le temps de lui dire à quel point il trouvait l’idée excellente, Mackenzie sortit son téléphone. Elle ouvrit son navigateur internet et commença à faire défiler les informations. Elle parvint à trouver un annuaire mais, comme elle l’avait supposé, il ne comportait aucun numéro direct ou personnel, seulement ceux des bureaux des conseillers. Pourtant, elle repéra deux conseillers spécifiquement assignés au département de sciences politiques et leur laissa des messages à tous les deux, en leur demander de la rappeler au plus tôt.
Dès qu’elle eut terminé, elle fit défiler sa liste de contacts.
- Et maintenant ? demanda Ellington.
- Il y en a seulement deux, répondit-elle. Autant essayer de voir si nous pouvons vérifier leurs antécédents – s’il y a le moindre élément préoccupant, nous serons très vite au courant.
Ellington hocha la tête en souriant face à sa rapidité d’esprit. Il l’écouta faire une requête dans ce sens. Mackenzie sentait son regard se poser sur elle de temps à autre, un regard plein d’amour et d’attention.
- Comment te sens-tu ? demanda-t-il.
Elle sut immédiatement ce qu’il voulait dire, sentant qu’il s’écartait un instant de l’enquête pour parler du bébé. Elle haussa les épaules, car elle ne voyait pas l’intérêt de lui mentir.
- Il est indiqué partout que les nausées matinales devraient s’arrêter bientôt mais je n’y crois pas. J’en ai ressenti plusieurs aujourd’hui. Et pour être honnête, je suis très fatiguée.
- Tu ferais peut-être mieux de rentrer à la maison, murmura-t-il. Je n’éprouve aucun plaisir à jouer au mari despotique mais… eh bien, je préférerais que mon bébé reste en bonne santé.
- Je sais. Mais il s’agit d’une série de meurtres sur un campus universitaire. Je doute que ça devienne dangereux. C’est probablement un type plein de testostérone qui prend son pied en tuant des jeunes femmes.
- D’accord, répondit Ellington. Mais seras-tu honnête avec moi, et me diras-tu si tu commences à te sentir faible ou pas dans ton assiette ?
- Oui. Promis.
Il l’examina d’un air suspicieux et en même temps joueur, comme s’il n’était pas sûr de pouvoir lui faire confiance. Puis il lui prit la main tout en les conduisant vers le centre ville pour trouver un hôtel pour la nuit.
***
Ils avaient à peine eu le temps de s’installer dans leur chambre quand le téléphone de Mackenzie sonna. Même si elle ne connaissait pas le numéro, elle répondit tout de suite. Elle sentait le poids du compte-à-rebours imposé par McGrath, l’heure qui tournait. Elle savait que si cette affaire n’était pas résolue au moment où les cours reprendraient la semaine suivante – dans cinq jours, en réalité – il serait de plus en plus difficile d’avancer avec le retour de tous les étudiants.
- Agent White à l’appareil, dit-elle en décrochant.
- Agent White, ici Charles McMahon, conseiller de parcours pédagogique à l’Université Queen Nash. Je vous rappelle suite au message que vous m’avez laissé.
- Génial, merci pour votre rapidité. Êtes-vous à l’université en ce moment ?
- Non. Je croule sous le travail, donc j’ai redirigé tous les messages de la ligne de mon bureau sur mon téléphone personnel.
- Oh, je vois. Eh bien, je me demandais si vous accepteriez de répondre à quelques questions au sujet d’un meurtre récent.
- Je suppose que vous parlez de Jo Haley.
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