— Oui, mais ça va, monsieur, dit Riley. Que puis-je faire pour vous ?
— Je me demandais si vous vous sentiriez prête à reprendre le travail, dit Meredith.
Riley s’assit dans son lit, plus alerte à chaque seconde.
Que devrais-je dire ? se demanda-t-elle.
Même après le souper d’hier, les choses étaient encore tendues entre Riley et ses deux filles. Les filles étaient encore maussades et distantes. Était-ce vraiment le bon moment pour retourner travailler ? Ne devrait-elle pas passer un peu de temps à essayer d’arranger les choses ici à la maison ?
— Y a-t-il une nouvelle affaire ? demanda-t-elle.
— On dirait bien, dit Meredith. Il y a eu deux meurtres dans la banlieue de Philadelphie ces dernières semaines. En raison de bizarreries sur les deux scènes de crime, les policiers locaux pensent qu’ils sont liés, et ils ont demandé notre aide. Je sais que vous êtres en train de vous remettre de votre blessure, et je ne veux pas que…
— Je vais le faire, dit Riley en l’interrompant.
Les mots étaient sortis avant même qu’elle ne sache qu’elle les avait prononcés.
— Je suis content de l’entendre, dit Meredith. Puis il ajouta :
— L’agent Jeffrey est toujours en congé. Je vais mettre l’agente Roston avec vous.
Riley s’y opposa presque. En cet instant, elle voulait vraiment avoir avec elle son partenaire de longue date et son meilleur ami, Bill Jeffreys, mais elle se souvint de leurs récentes conversations téléphoniques. Il avait plutôt eu l’air d’être tendu, et avec raison. Bill avait tiré sur l’homme qui avait attaqué Riley avec un pic à glace – lui avait tiré dessus et l’avait tué.
Ce n’était pas la première personne que Bill ou Riley avaient tuée dans l’exercice de leurs fonctions au fil des ans, mais Bill le prenait très mal, ce qui était inhabituel. C’était la première fois qu’il employait une force létale depuis qu’il avait tiré par erreur sur un innocent en avril dernier. Cet homme avait survécu, mais Bill était toujours hanté par son erreur.
— L’agente Roston irait bien, dit Riley à Meredith. La jeune agente afro-américaine était devenue la protégée de Riley ces derniers mois. Riley en était venue à avoir une haute opinion d’elle.
— Je tiendrai un avion prêt à décoller de Quantico pour Philadelphie dès que vous serez toutes les deux arrivées, dit Meredith. Retrouvez-moi sur le tarmac.
Ils raccrochèrent, et Riley resta assise sur le lit, fixant le téléphone pendant quelques instants.
Ai-je pris la bonne décision ? se demanda-t-elle.
Devrait-elle vraiment partir comme ça alors qu’il y avait tant d’incertitude ici, à la maison ?
La question suscita la même colère que la veille.
Encore une fois, elle n’aimait pas devoir tenir compte des désirs et des besoins des autres – surtout alors qu’ils négligeaient si souvent de penser à elle.
Elle pouvait rester ici à faire de son mieux pour calmer April et Jilly, s’excuser pour des choses qui n’étaient pas vraiment de sa faute, ou elle pouvait sortir et faire quelque chose d’utile. Et en ce moment, elle avait une tâche à accomplir – une tâche que peu de gens, sinon personne, pouvaient accomplir aussi bien qu’elle.
Elle regarda sa montre et vit qu’il était encore très tôt. Elle savait que Gabriela était déjà debout pour préparer le petit-déjeuner, mais les enfants devaient encore être au lit. Riley n’avait pas vraiment envie de leur expliquer sa décision, mais elle savait que Gabriela comprendrait si elle descendait et lui disait. Riley pouvait prendre quelque chose à manger et partir, et Gabriela le dirait aux filles avant de les envoyer à l’école.
Pendant ce temps, Riley devait s’habiller et préparer son bagage. Alors qu’elle se levait de son lit et se dirigeait vers la salle de bain, elle se rendit compte qu’elle se sentait mieux que depuis des jours.
Elle ferait bientôt quelque chose pour quoi elle était douée – même si cela pouvait être extrêmement dangereux.
Alors que l’avion du BAC décollait de Quantico, Riley commença à étudier les dossiers sur son ordinateur. Elle était sur le point de faire un commentaire sur un point particulier quand elle réalisa que Jenn Roston, assise à côté d’elle, ne faisait pas attention. Jenn regardait fixement par le hublot, apparemment perdue dans ses propres pensées.
— J’imagine qu’on ferait mieux de s’y mettre, dit Riley.
Mais elle n’eut pas eu de réponse de sa jeune coéquipière.
— Tu m’as entendue, Jenn ? dit Riley.
Encore une fois, il n’y eut pas de réponse.
Puis Riley dit plus sèchement :
— Jenn.
Jenn se tourna vers Riley avec une expression effrayée.
— Quoi ? dit-elle.
Riley avait l’impression que Jenn avait oublié où elle était.
Qu’est-ce qui se passe avec elle ? se demanda Riley.
Elles s’étaient dépêchées pour prendre l’avion à l’instant. Meredith n’avait même pas appelé les deux agents dans son bureau pour un briefing sur l’affaire. Au lieu de cela, il les avait retrouvées sur le tarmac à côté de l’avion en attente. Juste avant leur embarquement, Meredith avait fourni à la hâte des instructions à Riley sur comment télécharger les rapports de police pertinents. Elle l’avait à peine fait avant le décollage.
Maintenant, à mesure que l’avion prenait de l’altitude, elle s’attendait à tout revoir avec sa coéquipière. Mais Jenn n’avait pas l’air d’être elle-même.
Avec sa peau sombre, ses cheveux courts et raides et ses grands yeux intenses, la jeune partenaire de Riley ressemblait à une femme qui savait ce qu’elle faisait. Et c’était le cas d’habitude, mais aujourd’hui Jenn semblait distraite.
Riley montra son ordinateur.
— On a une affaire à résoudre.
Jenn acquiesça d’un signe de tête hâtif.
— Je sais. Qu’est-ce qu’on a ?
Tandis qu’elle parcourait les rapports de police, Riley dit :
— Pas grand-chose, du moins pas encore. Il y a une semaine, il y a eu un meurtre à Peterborough, dans la banlieue de Philadelphie. Justin Selves, un mari et père, a été tué dans sa maison. On lui a tranché la gorge.
— Quel était le mobile ? demanda Jenn.
— Au début, la police a supposé qu’il s’agissait d’un cambriolage qui avait mal tourné. Puis, pas plus tard qu’hier, une femme nommée Joan Cornell a été retrouvée morte dans sa propre maison à Springett, une banlieue juste à côté de Peterborough. On lui a aussi tranché la gorge, dit Riley.
Jenn inclina la tête.
— Peut-être que c’était juste un autre vol loupé. La cause de la mort pourrait n’être qu’une coïncidence. On dirait que ça devrait être facile à gérer sans notre aide pour les policiers locaux. On dirait pas que c’est un tueur en série.
En continuant à parcourir le rapport, Riley dit :
— Peut-être pas – sauf pour une chose étrange. Une chaise a été volée sur chaque scène de crime.
— Une chaise ? demanda Jenn.
— Oui, une chaise de salle à manger.
— Qu’est-ce que ça peut bien vouloir dire ? demanda Jenn.
— Rien encore, peut-être. C’est notre boulot de donner un sens à tout ça, dit Riley.
Jenn secoua la tête et marmonna :
— Des chaises. Nous enquêtons sur des chaises volées.
Puis elle haussa les épaules et ajouta :
— Je parie que ce n’est rien. Rien à examiner pour le BAC, en tout cas. Juste quelques meurtres stupides et méchants. Nous rentrerons probablement à Quantico avant même de nous en rendre compte.
Riley ne savait pas quoi dire. Elle n’avait pas l’habitude de se forger une opinion avant même qu’une affaire soit en cours. Ce n’était pas le cas de Jenn non plus, mais pour une raison ou une autre, Jenn semblait inhabituellement indifférente en ce moment.
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