Il ne sera plus fait de réquisitions dans les pays du roi de Sardaigne; on évacuera tous les magasins que l'on pourrait avoir dans ces pays, sur les places qui nous restent.
Il est expressément défendu aux commissaires des guerres d'accorder aucune route aux soldats isolés de leurs bataillons, jusqu'à ce qu'ils soient au nombre de vingt-cinq. A cet effet, les soldats qui se présenteront pour rejoindre leurs corps, resteront en subsistance dans la place jusqu'à ce qu'ils soient à ce nombre. Alors, le commissaire des guerres fera une feuille de route jusqu'à l'endroit où ils devront se séparer pour rejoindre chacun leurs corps.
Les commandans de place auront soin de faire armer les soldats, et de donner le commandement de ces détachemens à un sous-officier de garnison, s'il ne s'en trouve pas parmi ceux qui rejoignent; ce sous-officier accompagnera le détachement jusqu'à la garnison la plus prochaine.
Le général de division qui commande à Nice aura sous ses ordres tout le département des Alpes maritimes; il nommera des commandans dans toutes les étapes, afin de surveiller les soldats passagers et les étapiers.
Le général de division qui commande à Coni, aura sous sa surveillance tout le pays compris entre le département des Alpes maritimes, la Stura, le Tanaro, jusqu'aux états de Gênes: dès lors il commandera à Ceva et à Cherasco; il mettra, à chaque étape, un officier, auquel s'adresseront tous les militaires qui auront des feuilles de route, et sur le visa duquel les commandans piémontais feront délivrer l'étape à nos soldats.
Le général de division qui commandera à Tortone, aura sous sa surveillance tous les pays compris entre le Tanaro, la mer de Gênes, le Pô et les états du duc de Parme; il commandera dès-lors à Alexandrie: il nommera des officiers pour surveiller les soldats de passage dans chaque étape. Ce ne sera que sur son visa que les agens du roi de Sardaigne délivreront l'étape à nos soldats.
Le général commandant la Lombardie commandera; on nommera des officiers dans chaque étape pour surveiller les étapiers, et maintenir une bonne discipline chez les soldats de passage.
Le chef de l'état-major enverra à ces différens généraux la liste des officiers blessés, surnuméraires ou sans emploi, qui pourraient être employés à cet effet.
Le chef de l'état-major nommera deux officiers supérieurs pour surveiller les routes de Cassano à Peschiera, et de Pizzigithone à Goito: ces deux officiers se tiendront, le premier, à Chiaro, et le deuxième, à Casale-Major; ils nommeront des officiers à chaque étape pour surveiller les soldats et tenir la main à ce que les employés de Venise délivrent exactement, et en bonne fourniture, les étapes aux soldats et aux chevaux.
Chacun des officiers supérieurs aura avec lui quinze hommes de gendarmerie à cheval et un détachement de cent cinquante hommes, qui lui serviront à escorter les prisonniers et à se porter partout où il serait nécessaire pour la sûreté de la route.
Le général commandant le Mantouan établira des officiers dans toutes les étapes de son arrondissement, les généraux de division en feront autant, chacun dans son arrondissement, et jusqu'à l'étape qui joint la grande route.
La route de Plaisance joindra la grande communication de l'armée à Saint-Colombar.
L'officier supérieur qui commande la place de Plaisance aura la surveillance sur toute la route, depuis Saint-Colombar à Parme.
On mettra neuf jours pour aller de Coni à Pavie, sept de Pavie à Peschiera, et six de Pavie à Goito.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Bologne, le 3 messidor an 4 (21 juin 1796).
Au directoire exécutif.
La division du général Augereau, citoyens directeurs, a passé le Pô à Borgoforte, le 28 prairial; il est arrivé à Bologne le 1er messidor; il y a trouvé quatre cents soldats qui y ont été faits prisonniers.
Je suis parti de Tortone le 29 prairial; je suis arrivé le 1er messidor à Modène, d'où j'ai envoyé l'ordre, par l'adjudant-général Vegnat, à la garnison du château d'Urbin d'ouvrir ses portes, de poser les armes, et de se rendre prisonnière de guerre. J'ai continué ma route pour Bologne; je suis arrivé à minuit. Nous avons trouvé, dans le fort Urbin, cinquante pièces de canon bien approvisionnées, cinq cents fusils de calibre, de très-beau modèle, et des munitions de bouche pour nourrir six mille hommes pendant deux mois. Le fort Urbin est dans un bon état de défense; il a une enceinte bastionnée, revêtue et entourée de fossés pleins d'eau, avec un chemin couvert nouvellement réparé. Il était commandé par un chevalier de Malte, et trois cents hommes que nous avons faits prisonniers.
Nous avons fait prisonniers, à Bologne, le cardinal légat, avec tous les officiers de l'état-major, et pris quatre drapeaux. Nous avons également fait prisonnier le cardinal légat de Ferrare avec le commandant de ce fort, qui est un chevalier de Malte. Il y a dans le château de Ferrare cent quatorze pièces de canon.
L'artillerie que nous avons trouvée à Modène, au fort Urbin et au château de Ferrare, forme un équipage de siège qui nous mettra à même d'assiéger Mantoue.
Les vingt tableaux que doit nous fournir Parme sont partis. Le célèbre tableau de saint Jérôme est tellement estimé dans ce pays, qu'on offrait 1,000,000 pour le racheter.
Les tableaux de Modène sont également partis: le citoyen Barthelemy s'occupe, dans ce moment-ci, à choisir les tableaux de Bologne; il compte en prendre une cinquantaine, parmi lesquels se trouve la sainte Cécile, qu'on dit être le chef-d'oeuvre de Michel-Ange.
Monge, Berthollet, Thouin, naturaliste, sont à Pavie, où ils s'occupent à enrichir notre Jardin des Plantes et notre Cabinet d'histoire naturelle. J'imagine qu'ils n'oublieront pas une collection complète de serpens, qui m'a paru bien mériter la peine de faire le voyage. Je pense qu'ils seront après-demain à Bologne, où ils auront aussi une abondante récolte à faire.
J'ai vu, à Milan, le célèbre Oriani: la première fois qu'il vînt me voir, il se trouva interdit, et ne pouvait pas répondre aux questions que je lui faisais. Il revint enfin de son étonnement: «Pardonnez, me dit-il, mais c'est la première fois que j'entre dans ces superbes appartemens; mes yeux ne sont pas accoutumés....» Il ne se doutait pas qu'il faisait, par ce peu de paroles, une critique bien amère du gouvernement de l'archiduc. Je me suis empressé de lui faire payer ses appointemens et de lui donner tous les encouragemens nécessaires.
Au premier courrier, je vous enverrai une copie des lettres que je lui ai écrites, dès l'instant que j'ai reçu la recommandation que vous m'avez envoyée pour lui.
BONAPARTE.
Au quartier-général à Bologne, le 3 messidor an 4 (21 juin 1796).
Bonaparte, général en chef, aux commissaires du gouvernement près l'armée d'Italie.
Les mouvemens actuels d'une partie de l'armée de Wurmser sur la frontière des Grisons, et les renforts que Beaulieu reçoit tous les jours, ceux plus considérables encore qui sont en marche; l'opération sur Livourne, que le gouvernement m'a ordonné d'entreprendre, et à laquelle je n'ai vu aucun inconvénient militaire, comptant sur l'arrivée de six mille hommes, que devait conduire le général Châteauneuf-Randon, lesquels ont reçu contre-ordre et sont toujours à Nîmes; la garnison que je serai obligé de laisser dans la place de Livourne; tout nous fait une nécessité de faire venir, le plus promptement possible, deux demi-brigades de l'armée des Alpes. Il serait possible d'en tirer une des deux qui sont à Lyon, et une existante dans le département de la Drôme. Il sera facile au général de l'armée des Alpes de remplacer les deux demi-brigades par des colonnes mobiles, composées de garde nationale sédentaire mise en réquisition, et je lui fais passer, à cet effet, 150,000 liv. en numéraire, pour subvenir à leur solde.
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