166
"Quel don lui faire au declin de l'annee?
Le vent d'hiver a brule le gazon,
La fleur n'est plus et la feuille est fanee,
Rieh de vivant dans la morte saison…"
5 Et consultant d'une main bien-aimee
De votre herbier maint doux et cher feuillet,
Vous reveillez dans sa couche embaumee
Tout un Passe d'amour qui sommeillait…
Tout un Passe de jeunesse et de vie,
10 Tout un Passe qui ne peut s'oublier…
Et dont la cendre un moment recueillie
Reluit encore dans ce fidele herbier…
Vous y cherchez quelque debris de tige –
Et tout a coup vous y trouvez deux fleurs…
15 Et dans ma main par un secret prodige
Vous les voyez reprendre leurs couleurs.
C'etaient deux fleurs: l'une et l'autre etait belle,
D'un rouge vif, d'un eclat peu commun…
La rose brille et l'oeillet etincelle,
20 Tous deux baignes de flamme et de parfum…
Et maintenant de ce mystere etrange
Vous voudriez reconnaitre le sens…
Pourquoi faut-il vous l'expliquer, cher ange?..
Vous insistez. Eh bien soit, j'y consens.
25 Lorsqu'une fleur, ce frele et doux prestige,
Perd ses couleurs, languit et se fletrit,
Que du brasier on approche sa tige,
La pauvre fleur aussitot refleurit…
Et c'est ainsi que toujours s'accomplissent
30 Au jour fatal et reves et destins…
Quand dans nos coeurs les souvenirs palissent,
La Mort les fait refleurir dans ses mains…
167
Un ciel lourd que la nuit bien avant l'heure assiege,
Un fleuve, bloc de glace et que l'hiver ternit –
Et des filets de poussiere de neige
Tourbillonnent sur des quais de granit…
5 La mer se ferme enfin… Le monde recule,
Le monde des vivants, orageux, tourmente…
Et, bercee aux lueurs d'un vague crepuscule,
Le pole attire a lui sa fidele cite…
168
La lyre d'Apollon, cet oracle des dieux,
N 'est plus entre ses mains que la harpe d'Eolef
Et sa pensee – un reve aile, melodieux
Qui flotte dans les airs berce par sa parole.
169
Comme en aimant le coeur devient pusillanime,
Que de tristesse au fond et d'angoisse et d'effroi!
Je dis au temps qui fuit: arrete, arrete-toi,
Car le moment qui vient pourrait comme un abime
5 S'ouvrir entre elle et moi.
C'est la l'affreux souci, la terreur implacable,
Qui pese lourdement sur mon coeur oppresse.
J'ai trop vecu, trop de passe m'accable,
Que du moins son amour ne soit pas du passe.
170
Vous, dont on voit briller, dans les nuits azurees,
L'eclat immacule, le divin element,
Etoiles, gloire a vous! Splendeurs toujours sacrees!
Gloire a vous qui durez incorruptiblement!
5 L'homme, race ephemere et qui vit sous la nue,
Qu'un seul et meme instant voit naitre et defleurir,
Passe, les yeux au ciel. – Il passe et vous salue!
C'est l'immortel salut de ceux qui vont mourir.
171
Des premiers ans de votre vie
Que j'aime a remonter le cours,
Ecoutant d'une ame ravie
Ces recits, les memes toujours…
5 Que de fraicheur et de mystere,
En remontant ces bords heureux!
Quelle douce et tendre lumiere
Baignait ce ciel si vaporeux!
Combien la rive etait fleurie,
10 Combien le flot etait plus pur!
Que de suaves reveries
Se refletait dans son azur!..
Quand de votre enfance incomprise
Vous m'avez quelque temps parle,
15 Je crois sentir dans une brise
Glisser comme un printemps voile…
172
«Из Микеланджело»
Oui, le sommeil m'est doux! plus doux – de n'etre pas!
Dans ces temps de malheur et de honte supreme
Ne rien voir, rien sentir, c'est la volupte meme!..
Craignez de m'eveiller… de grace, parlez bas…
173
Il faut qu'une porte
Soit ouverte ou fermee –
Vous m'embetez, ma bien-aimee,
Et que le diable vous emporte.
174
D'une fille du Nord, chetive et languissante,
Eclose a l'ombre des forets,
Vous, en qui tout rayonne et tout rit et tout chante,
ous voulez emprunter les traits?
5 Eh bien, pardonnez-moi mon doute involontaire,
Je crains que l'on ne dise, en voyant ce tableau:
"C'est l'oranger en fleur, tout baigne de lumiere,
Qui veut simuler un bouleau".
175
De ces frimas, de ces deserts
La-bas, vers cette mer qui brille,
Allez-vous en, mes pauvres vers,
Allez-moi saluer ma fille.
176
La vieille Hecube, helas, trop longtemps eprouvee,
Apres tant de revers et de calamites,
Se refugie enfin, reposee et lavee,
Sous l'abri protecteur de vos jeunes bontes.
177
Lorsqu'un noble prince, en ces jours dedemerice,
Decort de sa main le bourreau des chretiens, –
Pourrait-on dire encore, ainsi qu'aux temps anciens:
«Honny soit qui mal y pense»?
178
Ah, quelle meprise –
Incroyable et profonde!
Ma fille rose, ma fille blonde
Qui veut se faire soeur grise.
179
Дополнения
1. Детское стихотворение
Любезному папеньке!
В сей день счастливый нежность сына
Какой бы дар принесть могла!
Букет цветов? – но флора отцвела,
И луг поблекнул и долина.
5 Просить ли мне стихов у муз?
У сердца я спрошусь.
И вот что сердце мне сказало:
В объятьях счастливой семьи,
Нежнейший муж, отец-благотворитель,
10 Друг истинный добра и бедных покровитель,
Да в мире протекут драгие дни твои!
Детей и подданных любовью окруженный,
На лицах вкруг себя радость узришь ты.
Так солнце, с горней высоты,
15 С улыбкой смотрит на цветы,
Его лучами оживленны.
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2. Шуточные стихотворения
Почтеннейшему имениннику
Филиппу Филипповичу Вигелю
Прими как дар любви мое изображенье,
Конечно, ты его оценишь и поймешь, –
Припомни лишь при сем простое изреченье:
«Не по хорошу мил, а по милу хорош».
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