Anne Rice - Entretien avec un vampire

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Entretien avec un vampire: краткое содержание, описание и аннотация

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De nos jours, à la Nouvelle-Orléans, un jeune homme a été convoqué dans l’obscurité d’une chambre d’hôtel pour écouter la plus étrange histoire qui soit. Tandis que tourne le magnétophone, son mystérieux interlocuteur raconte sa vie, sa vie de vampire.Comme l’interviewer, nous nous laissons subjuguer, fasciner et entraîner à travers les siècles dans un monde sensuel et terrifiant où l’atroce le dispute au sublime.
Véritable livre culte, premier volet des désormais incontournables «Chroniques des vampires»,
renouvelle totalement l’un des mythes les plus riches et les plus ambigus du fantastique.

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L’idée d’une autre question à poser parut tout à coup frapper le jeune homme; mais, avant qu’il eût pu ouvrir la bouche, le vampire avait repris :

— Ainsi que je vous le disais, ce vampire, Lestat, voulait mes plantations. Une raison un peu superficielle, assurément, pour me faire présent d’une vie qui durerait jusqu’à la fin du monde; mais ce n’était pas un être doué de beaucoup de discernement. Je devrais dire plutôt qu’il ne considérait pas le petit groupe de vampires qui peuplaient le monde comme un club select. Il avait des problèmes très humains — un père aveugle qui ne savait pas que son fils était un vampire, et qui ne devait pas le découvrir. Vivre à La Nouvelle-Orléans était devenu trop difficile pour lui, si l’on considérait ses besoins et son obligation de prendre soin de son père, et il voulait la Pointe du lac.

« Dès le soir suivant, nous partîmes pour la plantation, installâmes le père aveugle dans la chambre du maître de maison et procédâmes à mon changement. Je ne peux pas dire que cela se passa en une seule étape — quoique, bien sûr, il y eût un pas décisif après lequel il fut impossible de revenir en arrière. Mais la transformation se déroula en plusieurs actes, dont le premier fût la mort du surveillant. Lestat le prit dans son sommeil. Je devais regarder et approuver, c’est-à-dire être témoin de ce meurtre comme preuve de mon engagement et comme part de ma métamorphose. Cela se révéla sans aucun doute le moment le plus difficile pour moi. Je vous ai dit que je n’avais aucune crainte de mourir, mais que me donner la mort moi-même était une perspective qui me causait la nausée. J’avais naturellement le plus grand respect de la vie des autres et une horreur de la mort que la disparition de mon frère avait récemment développé. Je dus regarder le surveillant se réveiller en sursaut, tenter des deux mains de se dégager de Lestat, échouer, se débattre sous l’étreinte du vampire, et finalement s’affaisser, flasque, vidé de son sang. Puis mourir. Il ne mourut pas tout de suite. Nous restâmes dans sa chambre étroite presque une heure entière à le regarder mourir. Une étape de ma métamorphose, comme je le disais. Autrement, Lestat ne serais jamais resté. Ensuite, nous dûmes nous débarrasser du corps. Cela me rendit presque malade. Déjà faible et fiévreux, il ne me restait que peu de réserves, et manipuler un cadavre me souleva le cœur. Lestat riait, me disait sans pitié que je me sentirais si différent quand je serais vampire que j’en rirais aussi. Là-dessus, il se trompait. Je ne m’amuse jamais de la mort, même si j’en suis si souvent et si régulièrement la cause.

« Mais prenons les choses dans l’ordre. Nous dûmes remonter la route du fleuve jusqu’à la zone des champs sans clôtures et, là, nous abandonnâmes le corps. Nous déchirâmes les vêtements du mort, lui dérobâmes son argent et fîmes en sorte que ses lèvres soient maculées d’alcool. Je connaissais sa femme, qui vivait à La Nouvelle-Orléans, et savais de quel désespoir elle souffrirait lorsque le corps serait découvert. Mais, ce qui me faisait le plus mal, c’était qu’elle ne saurait jamais la vérité, qu’elle croirait que son mari, en état d’ivresse, avait été assassiné sur la route par des voleurs. Tandis que nous nous acharnions sur son corps, en meurtrissions le visage et les épaules, un sentiment d’alarme grandit en moi. Évidemment, il faut que vous compreniez que, durant tout cet épisode, le vampire Lestat m’avait paru extraordinaire. A mes yeux, il n’avait pas plus d’humanité qu’un ange biblique. Mais la fascination qu’il exerçait sur moi ne résista pas à la pression de mes sentiments. J’avais assisté à ma transformation en vampire sous deux lumières différentes. La première lumière était celle de l’enchantement pur et simple; Lestat m’avait subjugué sur mon lit de mort. Mais l’autre lumière était mon désir d’autodestruction; mon désir d’être totalement damné. C’était là la porte ouverte par laquelle Lestat était entré à deux reprises. Seulement, maintenant, il ne s’agissait plus de ma propre destruction, mais de celle d’autres êtres humains. Le surveillant, sa femme, sa famille… J’eus un mouvement de recul, et j’aurais fui Lestat, l’esprit totalement détraqué, s’il n’avait senti, grâce à un instinct infaillible, ce qui se produisait. Un instinct infaillible…, reprit le vampire d’un air méditatif. Disons plutôt le puissant instinct du vampire pour lequel le plus petit changement dans l’expression du visage d’un homme est aussi révélateur qu’un acte. Lestat était doué d’une rapidité surnaturelle. Il me précipita dans la voiture et fouetta les chevaux.

« — Je veux mourir, me mis-je à murmurer. C’est insoutenable, je veux mourir. Il est en votre pouvoir de me tuer. Laissez-moi mourir.

« Je refusais de le regarder, pour n’être pas fasciné par la beauté à l’état pur qu’il dégageait. Il m’appela par mon nom, doucement, en riant. Je le répète, il avait la ferme détermination d’avoir la plantation.

— Mais, de toute façon, demanda le jeune homme, vous aurait-il laissé partir?

— Je ne sais pas. Connaissant Lestat comme je le connais maintenant, je répondrais volontiers qu’il m’aurait tué plutôt que de me laisser aller. Mais c’était cela que je voulais, comprenez-vous? Non, en fait, c’était ce que je m’imaginais désirer. Dès que nous atteignîmes la maison, je sautai à bas de la voiture et marchai comme un zombie jusqu’à l’escalier de brique où mon frère était tombé. La maison était restée inhabitée pendant des mois — le surveillant avait une petite maison à lui — et la chaleur et l’humidité de la Louisiane avaient commencé de désagréger les marches. Dans chaque fissure poussaient de l’herbe et même des fleurs des champs. Je me rappelle cette sensation d’humidité que la nuit rendait fraîche comme je m’asseyais sur les premières marches et posais ma tête sur la brique tout en promenant mes mains parmi les fleurs aux tiges poisseuses. J’en arrachai une touffe du sol mou.

« — Je veux mourir! Tuez-moi, tuez-moi! dis-je au vampire. Maintenant, je suis coupable d’un crime. Je ne peux plus vivre.

« Il ricana avec l’impatience des gens à qui l’on conte des mensonges flagrants. Alors, en un éclair, il se saisit de moi, comme il s’était saisi de mon surveillant. Je me débattis sauvagement. J’enfonçai ma botte dans sa poitrine et tentai de le repousser, tandis que ses dents mordaient ma gorge et que la fièvre faisait battre mes tempes. Et, d’un mouvement de son corps entier, beaucoup trop rapide pour que je puisse le voir, il se retrouva soudain debout, d’un air de dédain, au pied de l’escalier.

« — Je croyais que vous vouliez mourir, Louis, dit-il.

Le jeune homme avait sursauté au moment où le vampire avait révélé son nom. Celui-ci, s’en apercevant, reconnut :

— Oui, c’est mon nom.

Puis il reprit son récit :

— Donc, je gisais sur ces marches, incapable de me défendre de ma propre lâcheté, de ma stupidité. Avec un peu de temps, honteux de ma couardise, j’aurais peut-être rassemblé assez de courage pour réellement me donner la mort, au lieu de gémir et de supplier les autres de le faire. Je rêvai alors qu’à l’aide d’un couteau je m’ouvrais les veines, languissant jour après jour dans une souffrance aussi nécessaire que la pénitence qui suit la confession, tout en souhaitant que la mort me prenne par surprise et me rende digne du pardon éternel. Puis je me vis debout en haut de l’escalier, là précisément où mon frère s’était tenu avant sa chute mortelle, et j’imaginai que je précipitais mon corps au bas des marches.

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