Honoré Balzac - Séraphîta

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Séraphîta: краткое содержание, описание и аннотация

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« Esprits purs, troupeau sacré, sortez des abîmes, volez sur la surface des ondes lumineuses ! L’heure a sonné, venez, rassemblez-vous ! Chantons aux portes du Sanctuaire, nos chants dissiperont les dernières nuées. Unissons nos voix pour saluer l’aurore du Jour Éternel. Voici l’aube de la Vraie Lumière ! Pourquoi ne puis-je emmener mes amis ? Adieu, pauvre terre ! adieu ! »

VII

L’ASSOMPTION

Ces derniers chants ne furent exprimés ni par la parole, ni par le regard, ni par le geste, ni par aucun des signes qui servent aux hommes pour se communiquer leurs pensées, mais comme l’âme se parle à elle-même ; car à l’instant où Séraphîta se dévoilait dans sa vraie nature, ses idées n’étaient plus esclaves des mots humains. La violence de sa dernière prière avait brisé les liens. Comme une blanche colombe, son âme demeura pendant un moment posée sur ce corps dont les substances épuisées allaient s’anéantir.

L’aspiration de l’Âme vers le ciel fut si contagieuse, que Wilfrid et Minna ne s’aperçurent pas de la Mort en voyant les radieuses étincelles de la Vie.

Ils étaient tombés à genoux quand il s’était dressé vers son orient, et partageaient son extase.

La crainte du Seigneur, qui crée l’homme une seconde fois et le lave de son limon, avait dévoré leurs cœurs.

Leurs yeux se voilèrent aux choses de la Terre, et s’ouvrirent aux clartés du Ciel.

Quoique saisis par le tremblement de Dieu, comme le furent quelques-uns de ces Voyants nommés Prophètes parmi les hommes, ils y restèrent comme eux en se trouvant dans le rayon où brillait la gloire de l’ESPRIT.

Le voile de chair qui le leur avait caché jusqu’alors s’évaporait insensiblement et leur en laissait voir la divine substance.

Ils demeurèrent dans le crépuscule de l’Aurore Naissante dont les faibles lueurs les préparaient à voir la Vraie Lumière, à entendre la Parole Vive, sans en mourir.

En cet état, tous deux commencèrent à concevoir les différences incommensurables qui séparent les choses de la Terre, des choses du Ciel.

La VIE sur le bord de laquelle ils se tenaient serrés l’un contre l’autre, tremblants et illuminés, comme deux enfants se tiennent sous un abri devant un incendie, cette vie n’offrait aucune prise aux sens.

Les idées qui leur servirent à se dire leur vision, furent aux choses entrevues ce que les sens apparents de l’homme peuvent être à son âme, la matérielle enveloppe d’une essence divine.

L’ESPRIT était au-dessus d’eux, il embaumait sans odeur, il était mélodieux sans le secours des sons ; là où ils étaient, il ne se rencontrait ni surfaces, ni angles, ni air.

Ils n’osaient plus ni l’interroger ni le contempler, et se trouvaient dans son ombre comme on se trouve sous les ardents rayons du soleil des tropiques, sans qu’on se hasarde à lever les yeux de peur de perdre la vue.

Ils se savaient près de lui, sans pouvoir s’expliquer par quels moyens ils étaient assis comme en rêve sur la frontière du Visible et de l’Invisible, ni comment ils ne voyaient plus le Visible, et comment ils apercevaient l’Invisible.

Ils se disaient : « — S’il nous touche, nous allons mourir ! » Mais l’ESPRIT était dans l’infini, et ils ignoraient que, ni le temps ni l’espace n’existent plus dans l’infini, qu’ils étaient séparés de lui par des abîmes, quoique en apparence près de lui.

Leurs âmes n’étant pas propres à recevoir en son entier la connaissance des facultés de cette Vie, ils n’en eurent que des perceptions confuses appropriées à leur faiblesse.

Autrement, quand vient à retentir la PAROLE VIVE dont les sons éloignés parvinrent à leurs oreilles et dont le sens entra dans leur âme comme la vie s’unit aux corps, un seul accent de cette Parole les aurait absorbés comme un tourbillon de feu s’empare d’une légère paille.

Ils ne virent donc que ce que leur nature, soutenue par la force de l’Esprit, leur permit de voir ; ils n’entendirent que ce qu’ils pouvaient entendre.

Malgré ces tempéraments, ils frissonnèrent quand éclata la VOIX de l’âme souffrante, le chant de l’ESPRIT qui attendait la vie et l’implorait par un cri.

Ce cri les glaça jusque dans la moelle de leurs os.

L’ESPRIT frappait à la PORTE-SAINTE. — Que veux-tu ? répondit un CHŒUR

dont l’interrogation retentit dans les mondes. — Aller à Dieu. — As-tu vaincu ? — J’ai vaincu la chair par l’abstinence, j’ai vaincu la fausse parole par le silence, j’ai vaincu la fausse science par l’humilité, j’ai vaincu l’orgueil par la charité, j’ai vaincu la terre par l’amour, j’ai payé mon tribut par la souffrance, je me suis purifié en brûlant dans la foi, j’ai souhaité la vie par la prière : j’attends en adorant, et suis résigné.

Nulle réponse ne se fit entendre.

— Que Dieu soit béni, répondit l’ESPRIT en croyant qu’il allait être rejeté.

Ses pleurs coulèrent et tombèrent en rosée sur les deux témoins agenouillés qui frémirent devant la justice de Dieu.

Tout à coup sonnèrent les trompettes de la Victoire remportée par L’ANGE dans cette dernière épreuve, les retentissements arrivèrent aux espaces comme un son dans l’écho, les remplirent et firent trembler l’univers que Wilfrid et Minna sentirent être petit sous leurs pieds. Ils tressaillirent, agités d’une angoisse causée par l’appréhension du mystère qui devait s’accomplir.

Il se fit en effet un grand mouvement comme si les légions éternelles se mettaient en marche et se disposaient en spirale. Les mondes tourbillonnaient, semblables à des nuages emportés par un vent furieux. Ce fut rapide.

Soudain les voiles se déchirèrent, ils virent dans le haut comme un astre incomparablement plus brillant que ne l’est le plus lumineux des astres matériels, qui se détacha, qui tomba comme la foudre en scintillant toujours comme l’éclair, et dont le passage faisait pâlir ce qu’ils avaient pris jusqu’alors pour la LUMIÈRE.

C’était le Messager chargé d’annoncer la bonne nouvelle, et dont le casque avait pour panache une flamme de vie.

Il laissait derrière lui des sillons aussitôt comblés par le flot des lueurs particulières qu’il traversait.

Il avait une palme et une épée, il toucha l’ESPRIT de sa palme. L’ESPRIT se transfigura, ses ailes blanches se déployèrent sans bruit.

La communication de la LUMIÈRE qui changeait l’ESPRIT en SÉRAPHIN, le revêtement de sa forme glorieuse, armure céleste, jetèrent de tels rayonnements, que les deux Voyants en furent foudroyés.

Comme les trois apôtres aux yeux desquels Jésus se montra, Wilfrid et Minna ressentirent le poids de leurs corps qui s’opposait à une intuition complète et sans nuages de LA PAROLE et de LA VRAIE VIE.

Ils comprirent la nudité de leurs âmes et purent en mesurer le peu de clarté par la comparaison qu’ils en firent avec l’auréole du Séraphin dans laquelle ils se trouvaient comme une tache honteuse.

Ils furent saisis d’un ardent désir de se replonger dans la fange de l’univers pour y souffrir les épreuves, afin de pouvoir un jour proférer victorieusement à la PORTE-SAINTE les paroles dites par le radieux Séraphin.

Cet Ange s’agenouilla devant le SANCTUAIRE qu’il pouvait enfin contempler face à face et dit en les désignant :

— Permettez-leur de voir plus avant, ils aimeront le Seigneur et proclameront sa parole.

À cette prière, un voile tomba. Soit que la force inconnue qui pesait sur les deux Voyants eût momentanément anéanti leurs formes corporelles, soit qu’elle eût fait surgir leur esprit au dehors, ils sentirent en eux comme un partage du pur et de l’impur.

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