Isaac Asimov - Cailloux dans le ciel

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Cailloux dans le ciel: краткое содержание, описание и аннотация

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Pour Joseph Schwartz, la chose arriva à l’instant où il avait un pied en l’air. Il se trouvait dans la ban­lieue de Chicago et s’apprêtait à enjamber une poupée de chiffon. Lorsqu’il reposa le pied, après avoir éprouvé une fugitive impression de vertige, sa chaussure s’enfonça dans l’herbe. Il était alors dans une forêt.
Ce qu’ignorait Joseph Schwartz, c’est qu’il ne s’était pas déplacé dans l’espace, mais qu’il avait effec­tué un immense bond dans le temps. Désormais, la Terre n’était plus qu’une petite planète d’intérêt stratégique secondaire dans l’im­mense empire galactique dirigé de­puis Trantor.
La présence d’un homme venu du passé ne va-t-elle pas modifier les rapports de force existant entre les Terriens et la garnison de soldats impériaux ?

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Mais Pola murmura avec effroi :

— Vous le livrerez aux Anciens.

Pour quoi faire ? Pour eux, il est sans intérêt et pour moi, il représente cent crédits. Si vous attendez que les Etrangers s’amènent, il y a de fortes chances pour qu’ils liquident votre type avant de constater qu’il n’a pas la Fièvre. Vous savez comment ils sont. Tuer un Terrien, ça ne leur fait ni chaud ni froid. Au contraire, ça leur ferait même plutôt plaisir.

— Emmenez aussi cette jeune fille, dit Arvardan. Mais une lueur madrée brilla dans les yeux aigus de Natter.

— Que non ! Rien à faire, patron. Je prends un risque calculé, comme qui dirait. Je peux sortir avec une personne mais peut-être pas avec deux. Et si j’en fais sortir une, ce sera celle qui aura le plus de valeur pour moi. C’est pas raisonnable ?

— Et si je vous arrachais les jambes ? Que se passerait-il, hein ? rétorqua Arvardan.

Natter broncha, mais il réussit quand même à s’esclaffer :

— Ce serait que vous êtes un imbécile. Ils finiraient par vous pincer et vous y passeriez, vous aussi. Allons, patron… Vous feriez mieux de me lâcher.

Pola agrippa le bras d’Arvardan.

— Non, je vous en prie ! C’est une chance qu’il faut saisir aux cheveux. Laissez-le faire comme il a dit. Vous tiendrez vos engagements, n’est-ce pas, monsieur Natter ?

Les lèvres de ce dernier se retroussèrent.

— Votre grand costaud d’ami m’a tordu le bras. Il n’avait pas le droit de faire ça et j’aime pas qu’on me brutalise. Ça vous coûtera cent crédits de mieux. Deux cents en tout.

— Mon père vous paiera…

— Cent d’avance, répliqua-t-il avec entêtement.

— Mais je ne les ai pas ! gémit la jeune fille.

— Ne vous inquiétez pas, laissa tomber Arvardan, glacial. J’ai ce qu’il faut.

Il sortit quelques billets de son portefeuille et les lança à Natter.

— Partons. Allez avec lui, Schwartz, ordonna Pola dans un souffle.

Schwartz obéit sans faire de commentaires. Avec indifférence. S’il était descendu dans l’enfer, il aurait manifesté tout aussi peu d’émotion.

A présent, Pola et Arvarda n’étaient seuls, se dévisageant d’un air déconcerté. C’était peut-être la première fois que la fille de Shekt regardait vraiment l’archéologue et elle était confondue qu’il soit aussi grand et d’une beauté aussi virile, aussi calme et confiant. Jusqu’à présent, elle ne l’avait considéré que comme un vague sauveur, agissant sans motif particulier, mais brusquement… Elle se sentit soudain prise de timidité et son cœur se mit à battre à tout rompre tandis que les événements des dernières heures s’embrouillaient dans sa tête et lui sortaient subitement de l’esprit.

Ils ne se connaissaient même pas par leurs noms.

— Je m’appelle Pola Shekt, dit-elle en souriant.

Arvardan, qui ne l’avait pas encore vu sourire, fut fasciné. Le visage de la jeune fille était comme illuminé et cela lui donnait l’impression… Il se hâta de chasser la pensée qui lui était venue. C’était une Terrienne !

— Et moi, Bel Arvardan, se contenta-t-il de répondre avec peut-être moins de cordialité qu’il ne l’aurait voulu – et il tendit une main bronzée dans laquelle disparut la petite main de Pola.

— Je vous remercie de votre aide.

Il haussa les épaules.

— Si nous nous en allions ? Je veux dire… maintenant que votre ami est parti. Et qu’il est sain et sauf… j’en suis sûr.

— Je pense qu’il y aurait eu beaucoup de vacarme si on l’avait capturé, ne croyez-vous pas ?

Son regard le suppliait de la confirmer dans cet espoir mais Arvardan se raidit pour ne pas céder à la tentation de la douceur et il répéta :

— Si nous nous en allions ?

Pola parut se crisper et ce fut sur un ton sec qu’elle fit :

Pourquoi pas ? Mais un son plaintif, un gémissement strident et lointain retentit. Les yeux de Pola s’élargirent et sa main retomba.

— Où est-ce qui se passe encore ? s’enquit Arvardan.

— Ce sont les Impériaux.

— Et vous avez peur d’eux, vous aussi ?

C’était l’Arvardan conscient de sa non-appartenance aux Terriens, l’archéologue de Sirius qui avait parlé. Préjugé ou pas, et si malmenée que fût la logique, l’arrivée des soldats impériaux était un élément d’équilibre intellectuel, d’humanité. Fort de son sentiment de supériorité, il se fit plus indulgent :

— Ne vous inquiétez pas pour les Etrangers, dit-il, allant jusqu’à employer l’expression par laquelle les Terriens désignaient les Impériaux. Je me charge d’eux, mademoiselle Shekt.

— Oh non ! s’écria-t-elle avec une brusque inquiétude. N’essayez surtout pas de les provoquer. Ne leur parlez pas, ne les regardez même pas.

Le sourire d’Arvardan s’élargit.

Les gardes les aperçurent avant qu’ils n’eussent atteint la sortie principale et ils reculèrent. Pola et Arvardan émergèrent dans une petite enclave de vide où régnait un étrange silence. Les véhicules militaires hululants approchaient.

Les voitures blindées surgirent sur l’esplanade et des soldats, la tête prise dans un globe transparent, sautèrent à terre. Devant eux, la foule, soulevée de panique, s’égailla sous les hurlements rauques et les coups de manche des matraques neuroniques qui pleuvaient.

Le lieutenant Claudy, qui ouvrait la marche, s’approcha d’un garde terrien en faction devant la porte.

— Alors, toi… qui a la Fièvre ?

Derrière la sphère de verre retenant de l’air pur, ses traits étaient légèrement déformés et le radio-amplificateur donnait à sa voix des sonorités vaguement métalliques. Le garde inclina respectueusement la tête.

— S’il plaît à Votre Honneur, nous avons isolé le malade dans le magasin. Les deux qui étaient avec lui sont devant l’entrée.

— Ils sont là ? Bon. Qu’ils attendent. Pour commencer, je veux qu’on évacue les curieux. Sergent, faites dégager la place !

L’ordre fut exécuté avec autant de brutalité que d’efficacité. Le crépuscule s’assombrissait sur Chica tandis que les badauds se débandaient. Les rues commençaient à scintiller d’un éclat tamisé et artificiel.

Le lieutenant Claudy tapota ses lourdes bottes du manche de sa matraque neuronique :

— Tu es sûr que le Terreux malade est toujours à l’intérieur ?

— Je ne l’ai pas vu sortir, Votre Honneur. Il doit y être.

— Bien. Admettons. Et ne perdons pas de temps. Sergent ! Décontaminez-moi ce bâtiment. Exécution !

Un groupe de soldats, que leurs combinaisons étanches protégeaient de tout contact avec le milieu extérieur, s’élancèrent au pas de charge. Un long quart d’heure s’écoula. Arvardan observait ce qui se passait avec une vive curiosité. C’était pour lui une expérience de relations interculturelles sur le terrain et, en professionnel qu’il était, il s’en serait voulu d’en troubler le déroulement. Quand le dernier soldat fut ressorti, les ténèbres enveloppaient le magasin comme un suaire.

— Scellez les portes !

Quelques minutes s’égrenèrent encore, puis les conteneurs de désinfectant disposés en différents points du magasin et à tous les étages s’ouvrirent. D’épaisses vapeurs moutonnantes s’en échappèrent, léchant les murs, s’infiltrant dans les moindres recoins, s’accrochant à chaque centimètre carré de surface, s’incorporant à l’air. Aucune créature protoplasmique, microbe ou homme, ne survivait à ce produit.

— Le lieutenant tourna alors son attention vers Arvardan et Pola : Comment s’appelait-il ?

Il n’y avait même pas de cruauté dans sa voix, rien que de l’indifférence. Un Terrien avait été tué. Eh bien, pas plus tard qu’aujourd’hui, le lieutenant avait aussi tué une mouche. Cela faisait deux.

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