Gérard de Villiers - A l'ouest de Jérusalem

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A l'ouest de Jérusalem: краткое содержание, описание и аннотация

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— N’essayez pas de m’attendrir, avertit Malko. Même nos adversaires de l’Est n’ont encore jamais employé une méthode aussi vile. Vexé, l’émir fit :

— Si vous connaissiez les horreurs perpétrées par l’Intelligence Service vous trouveriez ma combinaison d’une innocence angélique. Une fois, près de chez moi, ils ont fait liquider plus de deux mille rebelles, femmes et enfants compris, par des mercenaires…

Malko en avait assez :

— Finissons-en, dit-il. Vous allez me liquider, n’est-ce pas ? Alors, faites-le vite.

Sa rage était telle qu’il pensait sans peur à la mort. Et Dieu sait s’il aimait la vie !

L’émir sourit, méprisant.

— Vous êtes stupide. Je n’ai pas besoin de vous exécuter. Ce domaine m’appartient et jouit du privilège de l’exterritorialité. Les autorités de ce pays le savent et se garderaient bien d’y faire la moindre incursion. Même si vos amis de la C.I.A. le leur demandaient.

« Vous allez donc rester ici. Des semaines ou des mois. Vous êtes un otage intéressant. Et ne comptez sur personne pour vous faire évader. Je sais que vous n’êtes pas seul. Mais vos hommes ne pourront rien. Il faudrait une armée pour prendre d’assaut mon domaine. Dans ce cas, ajouta-t-il, je ferais immédiatement appel aux carabiniers. Je leur ai déjà demandé d’effectuer des rondes fréquentes. Il y a tant d’enlèvements en Sardaigne, ces temps-ci.

L’émir se grisait de ses propres paroles. Renversé en arrière dans son fauteuil, il étalait son double menton sur son col roulé. Le dégoût de Malko était tel qu’il se demanda s’il aurait le temps de l’étrangler avant que le géant café au lait, assis en tailleur derrière lui, puisse intervenir. Cela aurait valu la peine. Mais l’émir n’avait pas fini son monologue :

— J’ai besoin de vous dans l’immédiat, annonça-t-il. Vous allez écrire à Foster Hillman, après avoir vu sa fille. Il croit que je bluffe, que je n’oserai pas y toucher. Je voudrais que cette lettre soit assez bien tournée pour éviter d’autres amputations. Hillman doit cesser de me contrer.

Il parlait d’une voix doucereuse et égale, les yeux baissés, un peu comme un prêtre. Malko n’osait pas comprendre.

— Quoi ? Vous allez…

L’émir découvrit ses dents, avec toute la cruauté de l’Arabie.

— Le second doigt accompagnera votre lettre. J’ai un messager sûr. Je veux que M. Hillman comprenne que j’ai absolument besoin des renseignements que je lui demande. Je pensais qu’il tenait assez à sa fille pour éviter des enfantillages tels que votre venue et le piège de New York. Je regrette de m’être trompé.

— Autrement dit, articula lentement Malko, vous allez de nouveau torturer Kitty Hillman.

L’émir eut un geste évasif :

— Torturer est un mot inexact. Je ne tiens pas à la faire souffrir. Mais, en l’absence du docteur Weisthor, je suis obligé de faire appel à Schaqk, ici présent, qui opérera avec moins d’habileté.

— Jamais je n’écrirai cette lettre, dit Malko. D’ailleurs je vous ai dit que Foster Hillman est mort.

L’émir ne répondit pas tout de suite. Lui et Malko s’affrontaient du regard. Soudain l’Arabe claqua des doigts :

— J’ai une meilleure idée. C’est Mme Hillman qui va écrire à son père elle-même. Elle trouvera des mots meilleurs, qui le toucheront plus peut-être. Vous allez vous charger de lui faire rédiger cette lettre. Moi, je n’ai rien pu en tirer, elle ne veut même pas m’adresser la parole.

— C’est une malade mentale, coupa Malko, écœuré, elle est incapable d’écrire. Et je ne ferai rien pour la forcer…

Il croyait rêver. Par la fenêtre du bureau, il pouvait apercevoir les bungalows des invités. À quelques centaines de mètres il y avait des touristes, une vie normale. Ici, il était en pleine horreur moyenâgeuse. L’émir décrocha son téléphone et dit une longue phrase en arabe, puis il raccrocha et attendit, sans regarder Malko.

La porte s’ouvrit. Et Malko se trouva devant l’original de la photo que lui avait donnée le professeur Soussan.

Kitty Hillman était encore plus ravissante au naturel. Pieds nus, elle portait une petite robe de toile imprimée multicolore, probablement sans rien dessous, car le tissu dessinait toutes ses formes et la courbe délicate de sa poitrine. Malko fondit devant son visage mobile, enfantin, avec deux immenses yeux noisette.

Il y avait au fond une expression de peur animale, la panique qu’on voit dans les pupilles des animaux pris dans un incendie. Puis, elle regarda Malko, toujours en slip, et son expression changea. Une onde comme un sourire parcourut ses lèvres et son visage se détendit imperceptiblement. Malko ne pouvait détacher son regard du gros pansement sale qui entourait sa main gauche. L’émir ne bluffait pas en effet. Mais lorsqu’il croisa le regard des yeux dorés, il baissa les siens.

— Mme Hillman n’a pas prononcé un mot depuis qu’elle est en notre compagnie, dit-il. J’espère que vous serez plus heureux que nous… Je vais vous laisser avec elle.

À ce moment, Malko reconnut l’homme qui escortait Kitty Hillman. C’était un de ceux qui avaient voulu le tuer avec le Riva. Son complet noir dessinait presque tous ses os tant il était maigre et son visage plein de marques de petite vérole était repoussant. Malko se rapprocha soudain du bureau :

— Faites sortir tout le monde, dit-il d’une voix contenue. Je veux vous parler, seul à seul. Dans votre intérêt.

L’émir hésita. Mais il vit le tic d’inquiétude sur le visage d’Aziz et le chassa d’une interjection rauque. Il sortit en emmenant Kitty. Seul, Schaqk resta, toujours à la même place.

— Il ne parle que le dialecte de mon pays, dit l’émir, que voulez-vous me dire ?

— Vous allez me laisser partir avec cette jeune fille, dit-il. Je vous donne une minute. Cela vous laisse une chance de sauver votre vie. Après, il sera trop tard.

L’émir eut un sourire grinçant :

— C’est pour cette intimidation ridicule que vous avez voulu rester avec moi. Vous perdez votre temps, monsieur.

Les yeux de Malko avaient viré au vert, ce qui était très mauvais signe. Il dit lentement :

— Vous ne le savez pas, mais vous êtes déjà mort.

L’émir se troubla imperceptiblement mais parvint à dominer le tremblement de ses mains.

— Ce n’est pas vous qui m’exécuterez en tout cas, siffla-t-il. Ni Foster Hillman.

— Je vous répète que Foster Hillman est mort depuis une semaine, martela Malko. Exactement le jour où votre complice lui a téléphoné. Il s’est suicidé.

Les yeux de l’émir vacillèrent. À son tour, il posa un regard perçant sur Malko. Comment savoir s’il bluffait ? Malko voulut poursuivre son avantage :

— Vous avez toute la C.I.A. sur le dos. Je vous l’ai déjà dit. Même si je ne sors d’ici que mort. Et vous n’avez plus personne à faire chanter.

L’émir s’était repris :

— C’est faux, dit-il. Foster Hillman n’est pas mort. Je l’aurais appris.

— Nous avons fait le nécessaire pour que vous ne le sachiez pas, précisa amèrement Malko.

Toute leur machination pour sauver Kitty se retournait contre eux. Mais l’émir n’était pas encore abattu.

— Si Foster Hillman est mort, dit-il, je n’ai rien à craindre. Vous ne faites pas de sentiment dans votre métier. Vos chefs ne perdront ni argent ni homme pour retrouver une fille que ne peut leur servir à rien…

Malko eut un sourire froid.

— Avez-vous entendu parler du général Radford ? Il admirait profondément Foster Hillman. Il sait pourquoi il s’est suicidé. Il vous poursuivra toute sa vie. C’est lui qui dirige la C.I.A. maintenant, lui qui m’a envoyé ici.

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