Claire Duras - Les Explorateurs du Centre de l'Afrique

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Édouard-Joseph) l'Abbé (Durand Durand

Les Explorateurs du Centre de l'Afrique

– Séances des 24 et 26 août 1874. —

L'Afrique centrale a certainement été connue des anciens Égyptiens. L'Égypte seule avec sa vallée du Nil, ses déserts de Nubie et de Libye n'est pas une base suffisante pour expliquer la puissance des pharaons, des Sésostris et des Ptolémée. L'Égypte de cette époque était vraisemblablement un grand empire africain dans lequel ces souverains trouvèrent les soldats nécessaires aux armées avec lesquelles ils s'avancèrent jusqu'à l'Inde. Plus tard, l'empire d'Éthiopie se forma des débris de celui-ci. Il possédait encore au VIe siècle de notre ère une partie de l'Arabie, sa puissance devait donc renfermer une partie de l'Afrique. Au XVe siècle, les Portugais s'emparèrent de tout le littoral africain depuis le Maroc jusqu'en Abyssinie; ils y échelonnèrent un grand nombre de colonies florissantes qui passèrent successivement entre les mains des Hollandais et des Anglais, ou retombèrent sous le pouvoir des musulmans. Certainement les Portugais connaissaient les grandes routes de l'intérieur de ce continent. Leurs missionnaires, leurs commerçants et leurs voyageurs allaient du Congo au Mozambique, et de la côte de Guinée au Zanzibar, à Monbaça et à Sofala. Après la ruine de leur puissance, les Anglais préoccupés par des guerres incessantes avec la France ou la Hollande, n'occupèrent que les points du littoral utiles à leurs intérêts les plus pressants, mais ils négligèrent le centre de l'Afrique. Alors les routes intérieures furent oubliées, et le commerce de ces contrées retomba entre les mains des Arabes qui en ont conservé le secret jusqu'à nos jours.

Le centre de l'Afrique n'est pas aussi désert qu'on le croit ordinairement. C'est un vaste bassin au fond duquel s'étendent des lacs immenses aux bords ombragés de magnifiques forêts semblables à celles de la vallée de l'Amazone, et peuplées de troupeaux immenses d'éléphants, de rhinocéros, de gazelles, de girafes, de zèbres et autres animaux auxquels le lion fait une guerre perpétuelle.

Ces lacs sont au nombre de sept principaux; ils sont alimentés par les eaux torrentielles de la zone équatoriale. Ce sont: le Tanganika, le Bangweolo, le Moero, le Moura, le lac Sans Nom, le Victoria et l'Albert Nyanza. Ils forment les réservoirs des grands fleuves qui arrosent le continent africain, tels que le Congo ou Zaïre, l'Ogovai, le Niger sur la côte occidentale, le Zambèse et autres sur la côte orientale, et enfin le Nil dont les sources multiples semblent se cacher à plaisir aux investigations des explorateurs.

On dirait le lit d'une mer ancienne dont les eaux se retirant insensiblement se sont réduites aux bassins de ces lacs qui témoignent de son existence. Ces contrées riches et fertiles sont habitées par des peuples noirs très-nombreux et très-féconds. Depuis des siècles elles sont le réservoir principal de la traite des esclaves qui ont été introduits dans presque toutes les parties du monde. Les maladies, les guerres incessantes de tribu à tribu devraient y avoir fait le désert depuis des siècles.

Il n'en est pas ainsi; les voyageurs modernes ont été d'étonnement en étonnement à mesure qu'ils avançaient vers les régions du centre, et l'Europe, habituée à regarder l'Afrique comme un Sahara interminable, crut rêver en entendant la révélation des magnificences et du nombre des populations de l'intérieur de ce continent.

Le centre de l'Afrique a été exploré par les Portugais et évangélisé par les missionnaires jésuites et dominicains de cette nation. Ceux-ci connaissaient la région des grands lacs, ainsi que le prouve la carte chinoise d'Afrique construite par le père Verbiest, jésuite, directeur du tribunal des mathématiques de Pékin, sous le règne de Kang-Hi. Cette carte est exposée dans le vestibule de la maison des jésuites de Paris, rue de Sèvres. En 1662, l'un d'eux traversa l'Afrique d'Angola à Mozambique en suivant les vallées du Congo et du Zambèse.

En 1797, les Portugais essayèrent de retrouver les routes suivies par leurs aïeux. Un marchand d'esclaves de cette nation établi à Tête, sur le Zambèse, noua de nouvelles relations avec l'empereur du Monomotapa. En conséquence, la cour de Lisbonne y envoya le docteur Lacerda, astronome distingué, chef de la commission des limites entre le Brésil et le Pérou, avec une expédition chargée d'explorer le centre Afrique. Le 12 mars 1797, il entrait dans le Zambèse, remontait ce fleuve jusqu'à Tête, atteignait le Tchambèze et venait mourir à Loucenda, capitale de Lounda. Quelques années après, de 1802 à 1814, deux pombeiros d'Angola, ou esclaves marchands, firent plusieurs fois le voyage d'Angola à Tête. Ils traversèrent les rivières Louapoula et Loufiré. Leurs itinéraires donnèrent lieu à des travaux importants de la part des géographes.

A partir de cette époque jusqu'en 1831, le silence règne complètement pour l'Europe sur le centre de l'Afrique. Du reste, il faut dire que les Portugais ont trop caché leurs découvertes et en ont gardé précieusement le secret.

En 1831, le major Monteiro et le capitaine Gamitto reprenaient le même itinéraire, exploraient les monts Montchinga ou Movisa (1,200 à 2,100 mètres d'altitude), visités par Livingstone dans ces dernières années, et confirmaient les travaux de leurs devanciers. Après ces expéditions dont les dernières ont été inspirées par les Anglais, ceux-ci prenant pour base les explorations portugaises, envoyèrent le docteur Livingstone, membre de la Société royale britannique de géographie reconnaître l'Afrique centrale. Cet illustre voyageur commença ses voyages en 1846 et succomba sous le poids de ses fatigues en 1873, à Lobisa.

Il attaqua d'abord l'Afrique par le cap de Bonne-Espérance, et, de 1849 à 1851, il fit, en compagnie de sa femme et de ses enfants, deux voyages au pays des Betchuanas au N. du cap de Bonne-Espérance. Dans une première excursion, au delà du désert de Kalahari, il découvrait le petit lac Lgami; puis, à sa seconde excursion, il entrait dans une contrée fertile arrosée par un grand fleuve, le Zambèse. De retour à la ville du Cap, il renvoya sa famille en Angleterre, et se consacra totalement aux explorations géographiques, à l'aide des anciens itinéraires portugais.

D'abord, il remonta le Zambèse, et escorté d'une troupe de Malakolos, habitants du cours inférieur de ce fleuve, traversa en six mois le continent africain jusqu'à Saint-Paul de Loanda (1854) et revint à son point de départ. C'est un voyage de 800 à 900 lieues. A son deuxième voyage (1858-1864), il reconnut les contrées situées au nord de ce fleuve et découvrit le lac Nyassa ou Maravi, qui mesure environ 80 lieues de longueur et communique avec lui par le Chiré, un de ses affluents (1859). Voulant ensuite éclaircir la question des sources du Nil, dans un troisième voyage (1865), il partit de la côte de Zanguebar et s'engagea par le fleuve Rovuma, déversoir du Maravi, dans l'intérieur du continent (1866). Il atteignit successivement Bemba (1867) par 10° 10' de lat. australe, localité située entre le Nyassa et le Tanganika, et Loucenda, capitale du Lounda ou Cazembé, située par 8° 30' de lat. N. et 26° de long. E.

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