Gaston Maspero - L'égyptologie
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G. Maspero
L'égyptologie
G. MASPERO
L'Égyptologie est née en France; CHAMPOLLION le Jeune (1790-1832) en fut le fondateur, et, pendant un certain nombre d'années, cette science demeura exclusivement française. L'histoire de ses commencements se trouve écrite dans le rapport que M. DE ROUGÉ adressa, à propos de l'Exposition Universelle de Paris, en 1867, à Victor DURUY, alors ministre de l'Instruction publique: je ne reviendrai pas sur les faits antérieurs à cette date.
La génération d'égyptologues français qui avait succédé à celle de CHAMPOLLION et qui, avec Théodule DEVÉRIA (1831-1871), Emmanuel DE ROUGÉ (1811-1872), MARIETTE PACHA (1821-1881), CHABAS (1817-1882), avait déblayé vigoureusement les abords du terrain, commençait alors à disparaître sous la poussée d'une génération nouvelle. Tous les savants qui l'illustrèrent avaient travaillé isolément, chacun dans une direction différente: E. de Rougé à Paris, où il avait constitué, d'une manière presque définitive, la grammaire pour l'oeil des documents de la seconde époque thébaine, Chabas en province, à Chalon-sur-Saône, où il s'était appliqué surtout au déchiffrement des textes, Mariette à l'étranger, dans l'Égypte même, où, aidé par moments de Devéria, il s'était livré à l'exploration du sol, à la copie des inscriptions, au dégagement des grands monuments et où il avait fondé le service des Antiquités. La génération suivante s'occupa de régulariser la Science et de la mettre, une fois pour toutes, en possession des instruments nécessaires à la formation des générations futures. Elle se composait des hommes élevés à l'école d'Emmanuel de Rougé, Jacques DE ROUGÉ son fils, Paul PIERRET, Paul GUIEYSSE, Eugène LEFÉBURE, et bientôt du groupe qui se rassembla autour de Gaston MASPERO. J. DE ROUGÉ, qui se voua à la publication des oeuvres laissées malheureusement inachevées par son père, renonça de bonne heure à l'étude, après y avoir débuté brillamment par un mémoire sur les textes géographiques du temple d'Edfou, dont un livre sur les nomes de la Basse-Égypte compléta plus tard les données. Pierret, longtemps conservateur du Musée égyptien du Louvre, travailleur consciencieux mais lent et rare dans son activité, compila un petit Dictionnaire d'Archéologie (1875) et un Vocabulaire Hiéroglyphique (1871-1875), qui ont rendu pendant longtemps des services réels aux étudiants; de préférence, il oscilla sa vie durant entre la mythologie et la traduction avec commentaires des Inscriptions de son Musée, publiant d'une part la première traduction française du Livre des Morts (achevée en 1882), d' une stèle éthiopienne inédite et de divers manuscrits religieux (1873), de l'autre, ses deux Recueils d'Inscriptions inédites du Musée égyptien du Louvre (1874-1878). LEFÉBURE, esprit mystique et entraîné toute sa vie du côté du spiritisme ou de l'occultisme, a posé et résolu en partie les problèmes divers que soulèvent les religions égyptiennes. Ses Mémoires sur les Hymnes au Soleil composant le XVe Chapitre du Rituel funéraire (1868) et sur le Mythe Osirien: les yeux d'Horus (1874), Osiris (1875), sont encore pénétrés des idées de Max Müller sur la formation des mythes, mais l'étude des croyances sauvages et des superstitions populaires le ramena promptement à des doctrines plus saines, qu'il exposa dans une multitude d'articles dispersés à travers une demi-douzaine de revues différentes, les Mélanges d'Archéologie (1871-1878), le Recueil de travaux , les Transactions et les Proceedings de la société d'Archéologie biblique de Londres, la Zeitschrift für Aegyptische Sprache de Berlin, le Bulletin de l'Institut égyptien , les Annales du Musée Guimet , et surtout le Sphinx d'Upsala en Suède. Successivement maître de conférences à la Faculté des Lettres de Lyon (1878-1881, puis 1883-1884 et 1885-1886), directeur de la Mission archéologique du Caire (1881 et 1883), suppléant de M. MASPERO au Collège de France (1884-1885), maître de conférences à l'École supérieure d'Alger (1887-1908), Lefébure s'enferma dans un enseignement très technique et s'isola si complètement du reste de l'École, que, malgré sa connaissance approfondie des textes religieux et ses mérites sérieux de finesse et de clarté, il demeura presque sans influence sur le développement de l'Égyptologie. Le seul de ses nombreux écrits qui ait conquis la notoriété, les Hypogées royaux de Thèbes: t. I, le Tombeau de Séti Ier (1886) et t. II-III, Notices des Hypogées (1889), peut se comparer aisément, pour l'exactitude des copies, aux recueils de Lepsius, de Mariette, de Dümichen et de Rougé. GUIEYSSE, qui avait débuté dans la vie scientifique comme collaborateur de Lefébure, et qui avait essayé d'établir l'édition critique du Chapitre LXIV du Livre des Morts (1876), fut enlevé promptement à l'Égyptologie par la politique. Quoiqu'il soit resté attaché à l'École des hautes études comme maître de conférences et comme directeur d'études adjoint de 1880 à 1914, date de sa mort, il n'a pu nous donner que de rares études sur des points de détails: il allait se remettre tout entier à la recherche scientifique lorsqu'il disparut.
Quel que fût leur mérite, les travaux de ces savants manquaient encore de coordination; M. MASPERO groupa en un faisceau compact les forces qui s'assemblaient autour de lui. Mis en lumière dès sa sortie de l'École normale par deux Mémoires: Essai sur l'inscription dédicatoire du Temple d'Abydos (1867) et la Stèle du Songe (1868) puis, nommé, en 1869, répétiteur du cours d'archéologie égyptienne à l'École pratique des hautes études, que Victor Duruy venait de fonder, M. Maspero avait réuni à son cours une dizaine d'auditeurs sérieux: Adrien DE LONGPÉRIER, le fils du savant alors connu; l'abbé ANCESSI, qui mourut fort jeune après avoir publié trois brochures sur des Études de Grammaire comparée (1872-1873), sur Moïse et l'Égypte (1875), sur Job et l'Égypte (1877); Hyacinthe HUSSON qui avait déjà composé plusieurs écrits de mythologie; Eugène GRÉBAUT; puis, après la guerre, Maxence DE ROCHEMONTEIX, l'Américain William Berend, Eugène LEDRAIN qui quitta bientôt les hiéroglyphes pour l'hébreu, Urbain BOURIANT, Victor LORET, l'abbé AMÉLINEAU, Philippe VIREY.
Le travail fourni par ce groupe fut très considérable dès le début, et devint plus considérable encore lorsque M. Maspero eut succédé à E. de Rougé dans la chaire de Champollion, comme chargé de cours (1873), et presque aussitôt après comme professeur titulaire (1874). Pendant que M. Maspero publiait des traductions largement commentées de textes hiératiques, Hymne au Nil (1869), une Enquête judiciaire à Thèbes au temps de la XXe Dynastie (1869-1871), du Genre épistolaire chez les anciens Égyptiens (1872) qui lui servit de thèse pour le doctorat ès lettres, Mémoire sur quelques papyrus du Louvre (1875) et, dans le Journal asiatique , les premiers des Mémoires dont l'ensemble constitua plus tard ses Études égyptiennes , il produisait des oeuvres de théorie grammaticale sur le Pronom personnel en égyptien (1869), sur les Formes de la conjugaison en égyptien antique, en démotique et en copte (1871), Sur la Formation des thèmes trilitères en égyptien (1880), et il abordait l'étude critique du démotique par ses Études démotiques (dans le Recueil de travaux, 1870, t. I) puis par ses recherches sur
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