Jean Carrière - L’épervier de Maheux

Здесь есть возможность читать онлайн «Jean Carrière - L’épervier de Maheux» весь текст электронной книги совершенно бесплатно (целиком полную версию без сокращений). В некоторых случаях можно слушать аудио, скачать через торрент в формате fb2 и присутствует краткое содержание. Год выпуска: 2011, Жанр: Старинная литература, на французском языке. Описание произведения, (предисловие) а так же отзывы посетителей доступны на портале библиотеки ЛибКат.

L’épervier de Maheux: краткое содержание, описание и аннотация

Предлагаем к чтению аннотацию, описание, краткое содержание или предисловие (зависит от того, что написал сам автор книги «L’épervier de Maheux»). Если вы не нашли необходимую информацию о книге — напишите в комментариях, мы постараемся отыскать её.

L’épervier de Maheux — читать онлайн бесплатно полную книгу (весь текст) целиком

Ниже представлен текст книги, разбитый по страницам. Система сохранения места последней прочитанной страницы, позволяет с удобством читать онлайн бесплатно книгу «L’épervier de Maheux», без необходимости каждый раз заново искать на чём Вы остановились. Поставьте закладку, и сможете в любой момент перейти на страницу, на которой закончили чтение.

Тёмная тема
Сбросить

Интервал:

Закладка:

Сделать

Illico, la jeune esclave tomba dans le piège du ciel bleu, de l’air pur, des eaux claires et des prairies en fleurs : le style de ces missives était lui-même aussi fleuri que les champs de narcisses qu’elles évoquaient ; leur orthographe, irréprochable à ce qu’elle put en juger, indiquait le sérieux du caractère, la rectitude des intentions – hélas ! l’écriture généreuse, tout empanachée d’arabesques et de boucles artistiques, avait quelque chose de céleste, d’ailé, qui sentait son noble cœur d’une lieue, la larme à l’œil, le bouquet de violettes, le quatrain de sous-officier : toutes qualités requises pour qu’elle puisse entrevoir, outre la fin de son calvaire, les suprêmes félicités d’une vie champêtre en compagnie de ce cœur délicat et robuste, alternativement poète et paysan.

Si bien que, trois mois plus tard, la pauvre fille, que rien ne destinait à devenir une montagnarde, se retrouva là-haut, dans les nuages, mais pas exactement ainsi qu’elle l’avait imaginé : le ciel était immuablement gris, l’air glacé, l’eau claire, peut-être, mais il fallait aller la chercher loin, très loin, et quant aux fameuses prairies en fleurs, c’était une énorme muraille qui dressait ses flancs pelés jusqu’à mille mètres d’altitude. Les pieds toute la journée dans la boue, un ballot de linge sur la tête, un seau rempli d’eau froide au bout de chaque bras, déjà enceinte (d’Abel) et plus fourbue que jamais, eue ne tarda pas à se demander si elle avait vraiment gagné au change, et si, en fin de compte, le coron, la crasse, le tapage et l’ébriété n’étaient pas préférables à cette effrayante solitude, à ces tête-à-tête plutôt lugubres avec un bûcheron d’une sobriété exemplaire, c’est une affaire entendue, mais aussi sobre en paroles qu’il l’était devant les boissons : d’abord, rien ne donnait à espérer qu’il y ait jamais eu dans cette maison autre chose à boire que de l’eau ; ensuite, rien non plus ne laissait entendre que son mari, car la malheureuse était bel et bien mariée, ait la moindre aptitude à pousser la romance ou à taquiner la muse.

Parti dès l’aube, et par des temps à ne pas mettre un chien dehors – il faisait un printemps exécrable, ce qui n’arrangeait pas les affaires –, la hache et la houe sur l’épaule, avec, pour tout viatique, une poignée de châtaignons ou un morceau de fromage fourré dans sa musette (rarement les deux à la fois, et pour cause), il ne rentrait qu’à la nuit, à moitié mort de fatigue, de froid, et probablement de faim, et c’était tous les soirs le même scénario : la tête inclinée sur le brouet végétal quotidien, les mains croisées, il marmottait entre ses dents quelque chose qui devait ressembler à une action de grâce, avalait l’austère pitance sans lever le nez de son assiette ni piper mot, filait droit au lit où il sombrait incontinent dans un sommeil non moins austère assez voisin de la mort ; ayant le nez bouché, il dormait sur le dos, la bouche grande ouverte, comme les cadavres. De poésie, de ritournelle, pas l’ombre. Et ne parlons pas des galipettes : la sobriété englobait le lit. Bref, il n’était pas très vivant. Elle finit par admettre qu’il était même plutôt sinistre, plutôt renfermé : mais comment diable avait-il fait pour lui écrire des lettres aussi sentimentales, aussi romanesques ? A croire que ce n’était pas lui qui les avait écrites, ces lettres qu’elle relisait avec de plus en plus de perplexité. Longtemps elle s’interrogea sur les ténèbres mystérieuses de l’âme humaine, essayant de mettre l’attitude contradictoire de son mari sur le compte d’un excès de timidité, mais elle n’osait rien lui dire, car il lui faisait un peu peur. Jusqu’au jour où, en farfouillant dans le grenier, elle aperçut un paquet dissimulé sur une poutre ; il ne paraissait pas aussi poussiéreux que tout le reste, ce qui lui mit la puce à l’oreille : si par hasard c’était de l’argent ? On ne s’était pas fait faute, à Bessèges, de lui dire que les gens de la montagne sont si avares qu’ils sont capables de mourir dans la misère noire sur un matelas bourré de billets de banque.

Hélas ! Ce n’était qu’un paquet de journaux, une vieille collection de La Veillée des Chaumières , dont elle feuilleta quelques numéros : funeste initiative ! Elle sentit le sang se retirer de son visage : l’essentiel de sa correspondance amoureuse était imprimé là-dedans, des phrases entières, noir sur blanc (gris sur jaune : c’étaient de très vieux journaux) ; de quoi mourir-de honte, en se mettant à sa place, si toutefois il se savait découvert. C’est ce qui la retint, lorsqu’il rentra le soir-même, de les lui jeter à la figure. L’affaire en resta là, mais elle la digéra très mal, et, petit à petit, le sentiment de s’être fait rouler tourna à l’aigre, dégénéra en rancune tenace, d’autant plus tenace que les conditions dans lesquelles elle vivait n’avaient rien pour la lui faire oublier : elles étaient vraiment désastreuses : pas d’eau, du moins, d’eau courante, pas d’électricité, pas de confort du tout, pas d’argent, un avenir aussi bouché que l’était ce site sans horizon, pas de voisin, personne à qui se plaindre, sauf ce sourd-muet, et qui l’avait mystifiée par-dessus le marché, et par-dessus le marché, un climat épouvantable, surtout pour une fille de la vallée, presque de la plaine… C’était bien pire qu’à Bessèges.

Il était dans la nature des choses que l’enfer minier dont l’avait tirée le Taciturne devînt par contrecoup un paradis terrestre qu’elle orna de souvenirs plus merveilleux les uns que les autres. Comme elle les regrettait, ces fumées, cette rumeur ouvrière qui avaient enfiévré le décor de sa jeunesse ! Ici : silence. Elle ne sentait même plus le temps passer ; dans ce cirque désert où la vue s’écrasait contre les immenses remblais du plateau, et où les nuages projetaient des ombres froides et mouvantes qui la déprimaient plus que tout, les jours se ressemblaient d’une manière accablante : on aurait dit qu’ils glissaient sur sa vie sans amener d’autre changement que celui des saisons, et qu’elle demeurait immobile, impuissante à ralentir leur débâcle, prise dans une interminable agonie des heures, tandis qu’autour d’elle s’accélérait leur mouvement circulaire.

Abel était né. Elle s’arrêtait, parfois, stupéfaite de le voir déjà courir au milieu des herbes ; c’est vrai qu’il était né : à peine si elle s’en était rendu compte. Novembre 1922 : des douleurs dans une chambre glaciale, l’assistance d’une sage-femme mamelue et corsetée, à la respiration sifflante, qui réclamait du café et fumait sans interruption, une lancée de feu dans les reins arrachant un râle, la disparition instantanée des douleurs et en même temps des forces, comme vidées ensemble dans ce morceau, de chair indépendante, criant à son tour, quelques claques sur cette vieille poupée toute fripée, ébouillantée, laide à faire peur, et puis se déplissant telle une chrysalide, trouvant ses formes, ses couleurs naturelles, ses miaulements d’affamé ; pendant la boucherie, le père, debout au pied du lit, couillon majuscule conscient de sa paternité, tout a coup empoté devant tout ce gâchis, bousculé à coups de coude par la maîtresse femme aux bras de pâtissière, et qui ne peut souffrir les maris, relégué dans un coin ; coupable et bon à rien, vaguement cocu. A peine tenait-elle sur ses jambes que le cycle infernal reprenait de plus belle, aggravé de lessives continuelles, de charriages d’eau multipliés, de tétées qui vinrent rapidement à bout d’une poitrine expirante par nature.

Les souvenirs tombaient de plus en plus vite dans le passé, les saisons rappliquaient de plus en plus tôt. Tant qu’Abel eut trois mois, ou trois ans, on aurait dit que ça n’avançait guère, et il fallut qu’au bout de huit ans elle en attende un second pour réaliser que ces trois ans en avaient duré huit. Mais outre les lessives, l’apparition des varices et des premiers rhumatismes, que s’était-il passé au cours de ces huit années ?

Читать дальше
Тёмная тема
Сбросить

Интервал:

Закладка:

Сделать

Похожие книги на «L’épervier de Maheux»

Представляем Вашему вниманию похожие книги на «L’épervier de Maheux» списком для выбора. Мы отобрали схожую по названию и смыслу литературу в надежде предоставить читателям больше вариантов отыскать новые, интересные, ещё непрочитанные произведения.


Отзывы о книге «L’épervier de Maheux»

Обсуждение, отзывы о книге «L’épervier de Maheux» и просто собственные мнения читателей. Оставьте ваши комментарии, напишите, что Вы думаете о произведении, его смысле или главных героях. Укажите что конкретно понравилось, а что нет, и почему Вы так считаете.

x