Henry Murger - Scènes De La Vie De Bohème

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Scènes De La Vie De Bohème: краткое содержание, описание и аннотация

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L’histoire, les histoires plutôt ici narrées se déroulent à Paris au beau milieu du XIXè siècle, à la même époque et dans les mêmes endroits que la seconde partie des «Misérables» de Victor Hugo en fait. Là où par exemple le jeune Marius rencontre Enjolras et ses amis au jardin du Luxembourg en plein cœur de Paris et fraternisent autour du thème de la liberté, de l’amitié et du pouvoir au peuple entre deux beuveries et barricades.
Le Luxembourg parlons-en puisqu’un buste de l’auteur de ce livre survit encore dans un recoin peu fréquenté de ce grand jardin, un coin discret et érodé comme le parfait symbole de ce qui est raconté en ces lignes, pour moi le livre sans doute le plus beau et touchant que j’ai jamais pu lire.
L’histoire ce livre rejoint celle des fameux «Mystères de Paris» d’Eugène Sue, préalablement publié sous formes de feuilleton dans un journal avant d’être réuni et d’avoir le succès que l’on connaît. «Scènes de vie de Bohème» eut le même sort à la différence que le journal dans lequel ces «feuilletons» étaient publiés était une aimable mais discrète feuille satyrique appelée «Le corsaire». Henry Murger publia de plus ces différents feuilletons de manière irrégulière. Malgré ce parcours de bohème pourrait-on dire ses feuilletons trouvèrent toutefois un fort bel écho auprès de quelques éclaireurs de la vie littéraire parisienne (pas la plus dégueu de l’histoire hein?)
Pour le «grand» public, façon de parler bien sur puisque nous sommes mi XIXè, ce fut en fait l’adaptation très libre que fit Henry Murger avec l’aide du dramaturge Théodore Barrière au théâtre sous le nom «La vie de bohème» qui connut un immense succès fin 1849 et fit d’Henry Murger un auteur reconnu à défaut d’être très célèbre.
En 1851 parut donc pour la première fois ce livre-ci sous une forme et une construction voulue par l’auteur qui réunit le tout via un commencement inédit et une fin à l’avenant
Ce livre reprend donc comme le chef d’œuvre d’Eugène Sue le principe d’une écriture de feuilleton, ainsi des chapitre ne dépassant guère les 4-5 pages avec une chute finale toujours remarquée et remarquable;ainsi au hasard, celle-ci prise pour le chapitre XIV: «Hélas, pensa Rodolphe, lequel vaut le mieux? Ou de se laisser tromper toujours pour avoir cru ou ne jamais croire de peur d’être trompé toujours?»
Car d’amour il en est beaucoup question évidemment dans ces lignes et ces pages, mais pas seulement. La vie de bohème telle que l’on imagine aujourd’hui trouvant là son illustration littéraire la plus achevée avec bien entendu certains des poèmes des acteurs marquants de cette belle époque (cette vraie belle époque) dans l’histoire de la littérature française, citons sans être complet Gérard de Nerval, Théophile Gautier, Les frères Goncourt, Théodore de Banville et Charles Baudelaire bien entendu.
L’histoire relate les aventures de quatre amis tout «artistes» de cœur et d’âme:
– Le Musicien Schaunard tout occupé à composer sa grande œuvre musicale «l’influence du bleu dans l’art»
– Le philosophe Colline arpentant les rues parisiennes son grand manteau aux larges poches remplis de livres ou de papiers
– Le poète Rodolphe, héros central avec son amour avec Mimi, leur séparation et leurs retrouvailles douloureuses.
– Le peintre Marcel, celui qui refuse de vendre un tableau à un «amateur» ne connaissant rien de l’art (bien que l’on puisse se tromper à ce sujet comme le montrera l’un des épisodes les plus cocasses du livre)
Tout ce petit monde ayant en commun de mettre leur amitié et leur art (et l’amour) au-dessus de toute autre chose dans leur vie, partageant avec un égal mépris la moindre petite contingence les enlisant dans le réel alors qu’ils se vivent dans l’art et l’amour!!
Ce petit monde ayant aussi en commun de vivre sans le sou dans des mansardes où le maigre argent gagné se transforme bien plus souvent en peinture ou papier qu’en nourriture ou bois pour se chauffer, la vie de bohème est depuis restée dans le langage commun pour symboliser cette manière de vivre.
Cette succession de tableaux, tantôt légers, tantôt graves, qu’on devine d’ailleurs teintés d’emprunt au réel (Henry Murger a vécu cette bohème là et cette vie intellectuelle trépidante là qui n’allait pas encore de mise avec les beaux salons et l’opulence) nous raconte donc leurs différentes aventures avant de centrer une bonne partie de l’intrigue autour des amours tumultueux de Rodolphe et de Mimi, de leur amour lumineux puis de la lassitude de la demoiselle à vivre aussi pauvrement et précairement alors qu’un beau marquis lui fait une cour assidue. Elle s’en ira enfin vers lui mais pour au bout de quelques mois revenir s’enivrer l’espace de quelques jours avec son éternel amour puis de revenir en ces beaux quartiers, racontant son escapade au marquis de ces quelques lignes qui pour moi encore aujourd’hui sont sans doute les plus belles que j’ai jamais pu lire:
«Que voulez-vous? fit Mimi, j’ai besoin de temps en temps d’aller respirer l’air de cette vie-là. Mon existence folle est comme une chanson; chacun de mes amours est un couplet mais Rodolphe en est le refrain»
Mais outre cette histoire d’amour magnifique (à l’issue douloureuse sans vouloir effleurer la fin) ces récits regorgent de moments euphoriques, de moments difficiles mais toujours surmontés par un enthousiasme spontané et naïf de consacrer sa vie à l’art, à l’amour et à l’amitié en dépit des terribles épreuves vécues ici ou là.
Imaginez une série à la «Friends» centrée sur les garçons et se passant dans le Paris de 1840-1850, une série un peu moins comique certes mais autrement plus réelle et avec une profondeur de sentiments et d’émotions donnant presque chair aux personnages pour nous aussi par moment nous rendre euphoriques ou terriblement tristes selon les épisodes vécus.
En 1880 Puccini adaptera lui-aussi la pièce tirée de ces feuilletons pour en faire son plus célèbre opéra «La bohème», les amours de Rodolphe et Mimi feront à partir de là le tour du monde.
Plus d’un siècle plus tard et après nombre d’emprunt ou de citations dans la chanson ou à la littérature (comme Aznavour bien sur se retournant vers ces jeunes années et illustrant un nouveau chapitre de cette vie de bohème immortalisée par Murger) le cinéaste finlandais Aki Kaurismaki réalisera une adaptation libre du livre d’Henry Murger, basant l’histoire dans un Paris factice d’après-guerre et donnant à ces pages, et par la grâce d’acteurs magnifiques, d’une photo lumineuse et d’une mise en scène magique, une bouleversante version filmée de l’œuvre de Murger.
La prochaine fois que vous serez dans le jardin du Luxembourg, allez donc faire un tour devant le buste d’Henry Murger, il le mérite bien.

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Henry Murger Scènes De La Vie De Bohème Note du transcripteur Cette oeuvre - фото 1

Henry Murger

Scènes De La Vie De Bohème

Note du transcripteur: Cette oeuvre, adaptée en pièce de théâtre en 1849, et en livre en 1851, est aussi à l'origine de deux opéras (avec libretti en Italien): «La Bohème» de Ruggero Leoncavallo (1897) et le mieux connu, «La Bohème» de Giacomo Puccini (1896).

PREFACE

Les bohèmes dont il est question dans ce livre n'ont aucun rapport avec les bohèmes dont les dramaturges du boulevard ont fait les synonymes de filous et d'assassins. Ils ne se recrutent pas davantage parmi les montreurs d'ours, les avaleurs de sabres, les marchands de chaînes de sûreté, les professeurs d' à tout coup l'on gagne, les négociants des bas-fonds de l'agio, et mille autres industriels mystérieux et vagues dont la principale industrie est de n'en point avoir, et qui sont toujours prêts à tout faire, excepté le bien.

La Bohème dont il s'agit dans ce livre n'est point une race née d'aujourd'hui, elle a existé de tout temps et partout, et peut revendiquer d'illustres origines. Dans l'antiquité grecque, sans remonter plus haut dans cette généalogie, exista un bohème célèbre qui, en vivant au hasard du jour le jour parcourait les campagnes de l'Ionie florissante en mangeant le pain de l'aumône, et s'arrêtait le soir pour suspendre au foyer de l'hospitalité la lyre harmonieuse qui avait chanté les Amours d'Hélène et la Chute de Troie . En descendant l'échelle des âges, la Bohème moderne retrouve des aïeux dans toutes les époques artistiques et littéraires. Au moyen âge elle continue la tradition homérique avec les ménestrels et les improvisateurs, les enfants du gai savoir, tous les vagabonds mélodieux des campagnes de la Touraine; toutes les muses errantes qui, portant sur le dos la besace du nécessiteux et la harpe du trouvère, traversaient, en chantant, les plaines du beau pays, où devait fleurir l'églantine de Clémence Isaure.

À l'époque qui sert de transition entre les temps chevaleresques et l'aurore de la renaissance, la Bohème continue à courir tous les chemins du royaume, et déjà un peu les rues de Paris. C'est maître Pierre Gringoire, l'ami des truands et l'ennemi du jeûne; maigre et affamé comme peut l'être un homme dont l'existence n'est qu'un long carême, il bat le pavé de la ville, le nez au vent tel qu'un chien qui lève, flairant l'odeur des cuisines et des rôtisseries; ses yeux pleins de convoitises gloutonnes, font maigrir, rien qu'en les regardant, les jambons pendus aux crochets des charcutiers, tandis qu'il fait sonner, dans son imagination, et non dans ses poches, hélas! Les dix écus que lui ont promis messieurs les échevins en payement de la très-pieuse et dévote sotie qu'il a composée pour le théâtre de la salle du palais de justice. À côté de ce profil dolent et mélancolique de l'amoureux d'Esméralda, les chroniques de la Bohème peuvent évoquer un compagnon d'humeur moins ascétique et de figure plus réjouie; c'est maître François Villon, l'amant de la belle qui fut haultmière . Poète et vagabond par excellence, celui-là! Et dont la poésie, largement imaginée, sans doute à cause de ces pressentiments que les anciens attribuent à leurs vates , était sans cesse poursuivie par une singulière préoccupation de la potence, où ledit Villon faillit un jour être cravaté de chanvre pour avoir voulu regarder de trop près la couleur des écus du roi. Ce même Villon, qui avait plus d'une fois essoufflé la maréchaussée lancée à ses trousses, cet hôte tapageur des bouges de la rue Pierre-Lescot, ce pique-assiette de la cour du duc d'Égypte, ce Salvator Rosa de la poésie, a rimé des élégies dont le sentiment navré et l'accent sincère émeuvent les plus impitoyables, et font qu'ils oublient le malandrin, le vagabond, et le débauché, devant cette muse toute ruisselante de ses propres larmes.

Au reste, parmi tous ceux dont l'œuvre peu connue n'a été fréquentée que des gens pour qui la littérature française ne commence pas seulement le jour où «Malherbe vint,» François Villon a eu l'honneur d'être un des plus dévalisés, même par les gros bonnets du parnasse moderne. On s'est précipité sur le champ du pauvre et on a battu monnaie de gloire avec son humble trésor. Il est telle ballade écrite au coin de la borne et sous la gouttière, un jour de froidure, par le rapsode bohème; telles stances amoureuses improvisées dans le taudis où la belle qui fut haultmière détachait à tout venant sa ceinture dorée, qui aujourd'hui, métamorphosées en galanteries de beau lieu flairant le musc et l'ambre, figurent dans l'album armorié d'une Chloris aristocratique.

Mais voici le grand siècle de la renaissance qui s'ouvre. Michel-Ange gravit les échafauds de la Sixtine et regarde d'un air soucieux le jeune Raphaël qui monte l'escalier du Vatican, portant sous son bras les cartons des loges. Benvenuto médite son Persée , Ghiberti cisèle les portes du baptistère en même temps que Donatello dresse ses marbres sur les ponts de l'Arno; et pendant que la cité des Médicis lutte de chefs-d'œuvre avec la ville de Léon X et de Jules II, Titien et Véronèse illustrent la cité des doges; Saint-Marc lutte avec Saint-Pierre.

Cette fièvre de génie, qui vient d'éclater tout à coup dans la péninsule italienne avec une violence épidémique, répand sa glorieuse contagion dans toute l'Europe. L'art, rival de Dieu, marche l'égal des rois. Charles-Quint s'incline pour ramasser le pinceau du Titien, et François I erfait antichambre dans l'imprimerie où Étienne Dolet corrige peut-être les épreuves de Pantagruel .

Au milieu de cette résurrection de l'intelligence, la Bohème continue comme par le passé à chercher, suivant l'expression de Balzac, la pâte et la niche. Clément Marot, devenu le familier des antichambres du Louvre, devient, avant même qu'elle eût été favorite d'un roi, le favori de cette belle Diane dont le sourire illumina trois règnes. Du boudoir de Diane De Poitiers, la muse infidèle du poëte passe dans celui de Marguerite De Valois, faveur dangereuse que Marot paya par la prison. Presque à la même époque, un autre bohème, dont l'enfance avait été, sur la plage de Sorrente, caressée par les baisers d'une muse épique, Le Tasse, entrait à la cour du duc de Ferrare comme Marot à celle de François I er; mais, moins heureux que l'amant de Diane et de Marguerite, l'auteur de la Jérusalem payait de sa raison et de la perte de son génie l'audace de son amour pour une fille de la maison d'Este.

Les guerres religieuses et les orages politiques qui signalèrent en France l'arrivée des Médicis n'arrêtent point l'essor de l'art. Au moment où une balle atteignait, sur les échafauds des Innocents , Jean Goujon, qui venait de retrouver le ciseau païen de Phidias, Ronsard retrouvait la lyre de Pindare, et fondait, aidé de sa pléiade, la grande école lyrique française. À cette école du renouveau succéda la réaction de Malherbe et des siens, qui chassèrent de la langue toutes les grâces exotiques que leurs prédécesseurs avaient essayé de nationaliser sur le pernasse. Ce fut un bohème, Mathurin Régnier, qui défendit un des derniers les boulevards de la poésie lyrique attaquée par la phalange des rhéteurs et des grammairiens qui déclaraient Rabelais barbare et Montaigne obscur. Ce fut ce même Mathurin Régnier le cynique qui, rajoutant des nœuds au fouet satirique d'Horace, s'écriait indigné en voyant les mœurs de son époque:

L'honneur est un vieux saint que l'on ne chôme plus.

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