Jonathan Littell - Les Bienveillantes
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Je me levai tôt et traversai la maison vide et silencieuse. Dans la cuisine je trouvai du pain, du beurre, du miel, du café et je mangeai. Ensuite, je passai dans le salon et examinai les livres de la bibliothèque. Il y avait beaucoup de volumes en allemand mais aussi en anglais, en italien, en russe; je finis par me décider, avec une flambée de plaisir, pour L'éducation sentimentale, que je trouvai en français. Je m'installai près d'une fenêtre et lus durant quelques heures, levant de temps en temps la tête pour regarder les bois et le ciel gris. Vers midi, je me préparai une omelette au lard, et mangeai à la vieille table en bois qui occupait le coin de la cuisine, me versant de la bière que je bus à grands traits. Je me fis du café et fumai une cigarette, puis me décidai pour une promenade. J'enfilai mon manteau d'officier sans le boutonner: il faisait encore doux, la neige ne fondait pas mais durcissait et se racornissait sur elle-même. Je traversai le jardin et entrai dans la forêt. Les pins étaient bien espacés, très hauts, ils montaient et tout en haut se refermaient comme une vaste voûte, posée sur des colonnes. Çà et là il y avait encore des plaques de neige, le sol nu était dur, rouge, tapissé d'aiguilles sèches qui crissaient sous mes pas. Je débouchai sur une laie sablonneuse, une ligne droite entre les pins. Des traces de roues de chariots restaient imprimées dans le sol; au bord de la piste, de loin en loin, des troncs d'arbres débités s'entassaient proprement. La piste aboutissait à une rivière grise, large d'une dizaine de mètres; à l'autre rive montait un champ labouré dont les sillons, noirs, striaient la neige, butant contre un bois de hêtres. Je tournai à droite et entrai dans la forêt, suivant le cours de la rivière qui bruissait doucement. En marchant, je m'imaginais Una marchant avec moi. Elle était vêtue d'une jupe en laine avec des bottes, d'une veste d'homme en cuir et son grand châle tricoté. Je la voyais avancer devant moi, d'un pas sûr et tranquille, je la regardais, me pénétrant du jeu des muscles de ses cuisses, de ses fesses, de son dos fier et droit. Je ne pouvais rien imaginer de plus noble et de plus beau, de plus vrai. Plus loin, des chênes et des hêtres se mêlaient aux pins, le sol devenait marécageux, couvert de feuilles mortes gorgées d'eau à travers lesquelles le pied s'enfonçait dans une boue encore durcie par le froid. Mais un peu plus loin le sol se haussait légèrement et redevenait sec et agréable au pas. Il n'y avait ici presque que des pins, minces et droits comme des flèches, du bois jeune replanté après une coupe. Puis la forêt enfin s'ouvrait sur un pré dru, froid, presque sans neige, surplombant les eaux immobiles du lac. Sur la droite j'apercevais quelques petites maisons, la route, la crête de l'isthme couronnée de sapins et de bouleaux. Je savais que la rivière s'appelait la Drage, et qu'elle passait de ce lac au Dratzig-See puis continuait plus loin vers le Krössin-See, où se trouvait une école SS, près de Falkenburg. Je regardais l'étendue grise du lac: autour c'était le même paysage ordonné de terre noire et de bois. Je suivis la berge jusqu'au village. Un paysan, dans son jardin, me héla, et j'échangai quelques mots avec lui; il était inquiet, il avait peur des Russes, je ne pouvais lui donner de nouvelles précises mais je savais qu'il avait raison d'avoir peur. Sur la route, je pris vers la gauche et gravis lentement la longue côte, entre les deux lacs. Les talus étaient élevés et me cachaient les eaux. Au sommet de l'isthme, j'escaladai le tertre et passai entre les arbres, en repoussant les branches, jusqu'à un endroit d'où l'on domine d'assez haut toute une baie qui plus loin s'ouvre en grands plans irréguliers. L'immobilité des eaux, des forêts noires sur l'autre berge, conférait à ce paysage un aspect solennel, mystérieux, comme à un royaume au-delà de la vie, mais néanmoins encore en deçà de la mort, une terre d'entre les deux. J'allumai une cigarette et regardai le lac. Une conversation d'enfance ou plutôt d'adolescence me revenait en mémoire, ma sœur m'avait raconté, un jour, un vieux mythe poméranien, le légende de Vineta, une belle et arrogante ville engloutie dans la Baltique, dont les pêcheurs entendaient encore les cloches sonner sur les eaux à midi, et qu'on situait parfois près de Kolberg. Cette grande ville très riche, m'avait-elle expliqué avec un sérieux enfantin, fut perdue à cause du désir sans limite d'une femme, la fille du roi. Beaucoup de marins et de chevaliers venaient y boire et s'y amuser, des hommes beaux et forts, pleins de vie. Chaque soir, la fille du roi sortait déguisée dans la ville, elle descendait dans les auberges, les bouges les plus sordides, et elle choisissait un homme. Elle le ramenait dans son palais et lui faisait l'amour toute la nuit; au matin, l'homme était mort d'épuisement. Pas un, aussi fort fût-il, ne résistait à son désir insatiable. Elle faisait jeter leurs cadavres à la mer, dans une baie battue par les tempêtes. Mais ne pouvoir l'assouvir ne faisait qu'exciter l'immensité de son désir. On la voyait se promener sur la plage, chantant pour l'Océan à qui elle voulait faire l'amour. Seul l'Océan, chantait-elle, serait assez vaste, assez puissant pour combler son désir. Une nuit enfin, n'y tenant plus, elle sortit nue de son palais, laissant dans son lit le cadavre de son dernier amant. C'était une nuit de tempête, l'Océan fouettait les digues qui protégeaient la ville. Elle alla sur la jetée et ouvrit la grande porte de bronze placée là par son père. L'Océan entra dans la ville, prit la princesse et en fit sa femme, et garda la ville noyée comme montant de sa dot Lorsque Una eut achevé son histoire, je lui avais fait remarquer que c'était la même légende que celle, française, de la ville d'Ys. «Certes, m'avait-elle rétorqué sur un ton hautain, mais celle-ci est plus belle». – «Si je la comprends bien, elle explique que l'ordre de la cité est incompatible avec le plaisir insatiable des femmes». – «Je dirais plutôt le plaisir démesuré des femmes. Mais ce que tu proposes là, c'est une moralité d'homme. Moi je pense que toutes ces idées, la mesure, la moralité, ont été inventées par les hommes pour compenser la limitation de leur plaisir. Car les hommes savent depuis longtemps que leur plaisir ne pourra jamais être comparé au plaisir que nous endurons, que ce plaisir-là est d'un autre ordre.»
Sur le chemin du retour, je me sentais une coquille vide, un automate. Je songeais au rêve affreux de la nuit, j'essayais de m'imaginer ma sœur les jambes couvertes d'une diarrhée liquide, collante, à la puanteur abominablement douce. Les évacuées décharnées d'Auschwitz, blotties sous leurs couvertures, avaient elles aussi les jambes couvertes de merde, leurs jambes semblables à des bâtons; celles qui s'arrêtaient pour déféquer étaient exécutées, elles étaient obligées de chier en marchant, comme les chevaux. Una couverte de merde aurait été encore plus belle, solaire et pure sous cette fange qui ne l'aurait pas touchée, qui aurait été incapable de la souiller. Entre ses jambes maculées, je me serais blotti comme un nourrisson affamé de lait et d'amour, désemparé. Ces pensées me ravageaient la tête, impossible de les en chasser, je peinais à respirer et ne comprenais pas ce qui m'envahissait si brutalement. À la maison, j'errai sans but par les couloirs et les pièces, ouvrant et refermant les portes au hasard. Je voulus ouvrir celles des chambres de von Üxküll, mais m'arrêtai au dernier instant, la main sur la poignée, retenu par une gêne indicible, comme lorsque tout enfant je pénétrais en son absence dans le bureau de mon père pour caresser ses livres et jouer avec ses papillons. Je remontai à l'étage et entrai dans la chambre d'Una. J'ouvris rapidement les volets, les rejetant dans un grand fracas de bois. Des fenêtres, on dominait la cour d'un côté, et de l'autre la terrasse, le jardin et la forêt, au-delà de laquelle on apercevait un coin du lac. Je vins m'asseoir sur le coffre au pied du lit, face au grand miroir. Je contemplai l'homme devant moi dans la glace, un type avachi, fatigué, maussade, au visage gonflé de ressentiment. Je ne le reconnaissais pas, cela ne pouvait pas être moi, mais pourtant si. Je me redressai, levai la tête, ça ne changeait pas grand-chose. J'imaginai Una debout devant ce miroir, nue ou en robe, elle devait se trouver fabuleusement belle, et quelle chance elle avait de pouvoir se regarder ainsi, de pouvoir détailler son beau corps, mais peut-être que non, peut-être n'en voyait-elle pas la beauté, invisible à ses propres yeux, peut-être n'en percevait-elle pas l'étrangeté affolante, le scandale de ces seins et de ce sexe, cette chose entre les jambes qui ne peut être vue mais qui cache jalousement toute sa splendeur, peut-être n'en ressentait-elle que la lourdeur et le lent vieillissement, avec une légère tristesse ou tout au plus un doux sentiment de complicité familière, jamais l'âcreté du désir paniqué: Regarde, il n'y a là rien à voir. Respirant avec difficulté, je me levai, allai regarder par la fenêtre, vers la forêt. La chaleur engendrée par la longue marche s'était dissipée, la chambre me paraissait glaciale, j'avais froid. Je me tournai vers le secrétaire dressé contre le mur entre les deux croisées donnant sur le jardin, et j'essayai distraitement de l'ouvrir. Il était fermé à clef. Je descendis, allai trouver un gros couteau dans la cuisine, empilai du petit bois dans le serre-bûches, pris aussi la bouteille de cognac et un gobelet, et remontai. Dans la chambre, je me versai une mesure d'alcool, bus un peu, et entrepris de faire du feu dans le gros poêle cimenté à l'angle. Lorsqu'il eut bien pris, je me redressai et fis sauter la serrure du secrétaire avec le couteau. Elle céda facilement Je m'assis, le verre de cognac près de moi, et fouillai les tiroirs. Il y avait là toute sorte d'objets et de papiers, des bijoux, quelques coquillages exotiques, des fossiles, de la correspondance d'affaires, que je parcourus distraitement, des lettres adressées à Una depuis la Suisse et traitant surtout de questions de psychologie mêlées à des potins anodins, d'autres choses encore. Dans un tiroir, serrée dans un petit portefeuille en cuir, je trouvai une liasse de feuillets rédigés de sa main: des brouillons de lettres qui m'étaient adressées, mais qu'elle n'avait jamais envoyées. Le cœur battant, je dégageai le bureau en enfournant le reste des objets dans les tiroirs et étalai les lettres comme un éventail de cartes à jouer. Je laissai courir mes doigts dessus et en choisis une, au hasard pensais-je, mais ce n'était sans doute pas entièrement le hasard, cette lettre était datée du 28 avril 1944 et commençait ainsi: Cher Max, ça fait un an aujourd'hui que Maman est morte. Tu ne m'as jamais écrit, tu ne m'as jamais rien dit de ce qui s'est passé, tu ne m'as jamais rien expliqué… La lettre s'interrompait là, j'en parcourus rapidement quelques autres, elle paraissaient toutes inachevées. Alors je bus un peu de cognac et me mis à tout raconter à ma sœur, exactement comme je l'ai écrit ici, sans rien omettre. Cela prit un certain temps; lorsque j'achevai la chambre s'obscurcissait. Je pris une autre lettre et me levai pour l'approcher de la fenêtre. Celle-ci parlait de notre père et je la lus d'une traite, la bouche sèche, crispé par l'angoisse. Una écrivait que mon ressentiment envers notre mère, pour le compte de notre père, avait été injuste, que notre mère avait eu une vie difficile à cause de lui, de sa froideur, de ses absences, de son départ final, inexpliqué. Elle me demandait si je me souvenais même de lui. En fait je me souvenais de peu de choses, je me rappelais son odeur, sa sueur comment nous nous ruions sur lui pour l'attaquer, lorsqu'il lisait sur le divan, et comment il nous prenait alors dans ses bras en riant à gorge déployée. Une fois, je toussais, il m'avait fait avaler un médicament que j'avais tout de suite vomi sur le tapis; je mourais de honte, j'avais peur qu'il ne se fâche, mais il avait été très gentil, il m'avait consolé puis avait nettoyé le tapis. La lettre continuait, Una m'expliquait que son mari avait connu notre père en Courlande, que notre père, comme me l'avait indiqué le juge Baumann, commandait un Freikorps. Von Üxküll commandait une autre unité, mais il le connaissait bien. Berndt dit que c'était un animal déchaîné, écrivait-elle. Un homme sans foi, sans limites. Il faisait crucifier des femmes violées aux arbres, il jetait lui-même des enfants vivants dans les granges incendiées, il livrait les ennemis capturés à ses hommes, des bêtes affolées, et riait et buvait en regardant les supplices. Dans le commandement, il était obstiné, borné, il n'écoutait personne. Toute l'aile qu'il était censé défendre à Mitau s'est effondrée à cause de son arrogance, précipitant la retraite de l'armée. Je sais que tu ne vas pas me croire, ajoutait-elle, mais c'est la vérité, penses-en ce que tu veux. Épouvanté, saisi de rage, je froissai la lettre, je fis le geste de la déchirer, mais je me retins. Je la jetai sur le secrétaire et esquissai quelques mouvements à travers la pièce, je voulus sortir, je revins, j'hésitais, bloqué par une cascade d'impulsions divergentes, enfin je bus du cognac, cela me calma un peu, je pris la bouteille et descendis boire encore au salon. Käthe était arrivée et préparait le repas, elle entrait et sortait de la cuisine, je ne voulais pas me retrouver en sa présence. Je retournai dans le hall d'entrée et ouvris la porte des appartements de von Üxküll. Il y avait là deux belles pièces, un cabinet de travail et une chambre à coucher, meublées avec goût, du mobilier ancien et lourd en bois sombre, des tapis orientaux, de simples objets en métal, une salle de bains munie d'un équipement particulier, sans doute adapté à sa paralysie. À regarder tout cela, je ressentais de nouveau un vif sentiment de gêne, en même temps je n'en avais cure. Je me promenai dans la pièce de travail: aucun objet n'encombrait le grand bureau massif et sans chaise; sur les étagères, il n'y avait que des partitions, de compositeurs en tous genres rangées par pays et par périodes avec, à part, une petite pile de partitions reliées, ses propres œuvres. J'en ouvris une et contemplai les séries de notes, une abstraction pour moi, que je ne savais pas lire. À Berlin, von Üxküll m'avait parlé d'une œuvre qu'il projetait, une fugue ou, comme il avait dit, une suite de variations sérielles en forme de fugue. «Je ne sais pas encore si ce que j'envisage est vraiment possible», avait-il dit. Lorsque je lui avais demandé quel en serait le thème, il avait eu une moue: «Ce n'est pas de la musique romantique. Il n'y a pas de thème. C'est juste une étude». – «À quoi la destinez-vous?» avais-je alors demandé. – «À rien. Vous savez bien qu'on ne joue pas mes œuvres en Allemagne. Je ne l'entendrai sans doute jamais jouer». – «Pourquoi l'écrivez-vous, alors?» Et il avait souri, un grand sourire de plaisir: «Pour l'avoir fait avant de mourir».
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