Alexandre Dumas - La dame de Monsoreau — Tome 2

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La dame de Monsoreau — Tome 2: краткое содержание, описание и аннотация

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— Et de quelle façon?

— De la façon dont elle se fût arrangée si vous eussiez été véritablement malade, que mon ami Gorenflot vous eût confessé et que vous lui eussiez remis les papiers qu'il vous demandait. Alors je vous eusse pardonné et j'eusse même dit de grand coeur un in manus pour vous. Eh bien, je ne serai pas plus exigeant pour le vivant que pour le mort; et ce qui me reste à vous dire, le voici: Monsieur David, vous êtes un homme accompli: l'escrime, le cheval, la chicane, l'art de mettre de grosses bourses dans de larges poches, vous possédez tout. Il serait fâcheux qu'un homme comme vous disparût tout à coup du monde, où il est destiné à faire une si belle fortune. Eh bien, cher monsieur David, ne faites plus de conspirations, fiez-vous à moi, rompez avec les Guises, donnez-moi vos papiers, et, foi de gentilhomme! je ferai votre paix avec le roi.

— Tandis qu'au contraire, si je ne vous les donne pas? demanda Nicolas David.

— Ah! si vous ne me les donnez pas, c'est autre chose. Foi de gentilhomme, je vous tuerai! Est-ce toujours drôle, cher monsieur David?

— De plus en plus, répondit l'avocat en caressant son épée.

— Mais si vous me les donnez, continua Chicot, tout sera oublié; vous ne me croyez pas peut-être, cher monsieur David, car vous êtes d'une nature mauvaise, et vous vous figurez que mon ressentiment est incrusté dans mon coeur comme la rouille dans le fer. Non, je vous hais, c'est vrai, mais je hais M. de Mayenne plus que vous; donnez-moi de quoi perdre M. de Mayenne, et je vous sauve; et puis, voulez-vous que j'ajoute encore quelques paroles, que vous ne croirez pas, vous qui n'aimez rien que vous-même? Eh bien, c'est que j'aime le roi, moi, tout niais, tout corrompu, tout abâtardi qu'il est; le roi qui m'a donné un refuge, une protection contre votre boucher de Mayenne, qui assassine de nuit, à la tête de quinze bandits, un seul gentilhomme, sur la place du Louvre; vous savez de qui je veux parler, c'est de ce pauvre Saint-Mégrin; n'en étiez-vous pas de ses bourreaux, vous? Non, tant mieux, je le croyais tout à l'heure, et je le crois bien plus encore maintenant. Eh bien, je veux qu'il règne tranquillement, mon pauvre roi Henri, ce qui est impossible avec les Mayenne et les généalogies de Nicolas David. Livrez-moi donc la généalogie, et, foi de gentilhomme, je tais votre nom et fais votre fortune.

Pendant cette longue exposition de ses idées, qu'il n'avait même faite si longue que dans ce but, Chicot avait observé David en homme intelligent et ferme. Pendant cet examen, il ne vit pas se détendre une seule fois la fibre d'acier qui dilatait l'oeil fauve de l'avocat; pas une bonne pensée n'éclaira ses traits assombris; pas un retour de coeur n'amollit sa main crispée sur l'épée.

— Allons, dit Chicot, je vois que tout ce que je vous dis est de l'éloquence perdue, et que vous ne me croyez pas; il me reste donc un moyen de vous punir d'abord de vos torts anciens envers moi, puis de débarrasser la terre d'un homme qui ne croit plus à la probité ni à l'humanité. Je vais vous faire pendre. Adieu, monsieur David.

Et Chicot fit à reculons un pas vers la porte sans perdre de vue l'avocat.

Celui-ci fit un bond en avant.

— Et vous croyez que je vous laisserai sortir? s'écria l'avocat; non pas, mon bel espion; non pas, Chicot, mon ami: quand on sait des secrets comme ceux de la généalogie, on meurt! Quand on menace Nicolas David, on meurt! Quand on entre ici comme tu y es entré, on meurt!

— Vous me mettez parfaitement à mon aise, répondit Chicot avec le même calme; je n'hésitais que parce que je suis sûr de vous tuer. Crillon, en faisant des armes avec moi, m'a appris, il y a deux mois, une botte particulière, une seule; mais elle suffira, parole d'honneur. Allons, remettez-moi les papiers, ajouta-t-il d'une voix terrible, ou je vous tue! et je vais vous dire comment: je vous percerai la gorge où vous vouliez saigner mon ami Gorenflot.

Chicot n'avait point achevé ces paroles, que David, avec un sauvage éclat de rire, s'élança sur lui; Chicot le reçut l'épée au poing.

Les deux adversaires étaient à peu près de la même taille; mais les vêtements de Chicot dissimulaient sa maigreur, tandis que rien ne dissimulait la nature longue, mince et flexible de l'avocat. Il semblait un long serpent, tant son bras prolongeait sa tête, tant son épée agile s'agitait comme un triple dard; mais, comme le lui avait annoncé Chicot, il avait affaire à un rude adversaire; Chicot, faisant des armes presque tous les jours avec le roi, était devenu un des plus forts tireurs du royaume; c'est ce dont Nicolas David put s'apercevoir, en trouvant toujours le fer de son adversaire, de quelque façon qu'il cherchât à l'attaquer.

Il fit un pas de retraite.

— Ah! ah! dit Chicot, vous commencez à comprendre, n'est-ce pas? Eh bien, encore une fois, les papiers.

David, pour toute réponse, se jeta de nouveau sur le Gascon, et un second combat s'engagea plus long et plus acharné que le premier, quoique Chicot se contentât de parer et n'eût pas encore porté un coup. Cette seconde lutte se termina, comme la première, par un pas de retraite de l'avocat.

— Ah! ah! dit Chicot, à mon tour maintenant.

Et il fit un pas en avant.

Pendant qu'il marchait, Nicolas David dégagea pour l'arrêter. Chicot para prime, lia l'épée de son adversaire tierce sur tierce, et l'atteignit à l'endroit qu'il avait indiqué d'avance; il lui enfonça la moitié de sa rapière dans la gorge.

— Voilà le coup, dit Chicot.

David ne répondit pas; il tomba du coup aux pieds de Chicot en crachant une gorgée de sang.

Chicot à son tour fit un pas de retraite. Tout blessé à mort qu'il est, le serpent peut encore se redresser et mordre.

Mais David, par un mouvement naturel, essaya de se traîner vers son lit comme pour défendre encore son secret.

— Ah! dit Chicot, je te croyais retors, et tu es sot, au contraire, comme un reître. Je ne savais pas l'endroit où tu avais caché tes papiers, et voilà que tu me l'apprends.

Et, tandis que David se tordait dans les convulsions de l'agonie, Chicot courut au lit, souleva le matelas et trouva, sous le chevet, un petit rouleau de parchemin, que David, dans l'ignorance de la catastrophe qui le menaçait, n'avait pas songé à cacher mieux.

Au moment même où il le déroulait pour s'assurer que c'était bien le papier qu'il cherchait, David se soulevait avec rage; puis, retombant aussitôt, rendait le dernier soupir.

Chicot parcourut d'abord d'un oeil étincelant de joie et d'orgueil le parchemin rapporté d'Avignon par Pierre de Gondy.

Le légat du pape, fidèle à la politique du souverain pontife depuis son avènement au trône, avait écrit au bas:

Fiat ut voluit Deus: Deus jura hominum fecit.

— Voilà, dit Chicot, un pape qui traite assez mal le roi très-chrétien.

Et il plia soigneusement le parchemin, qu'il introduisit dans la poche la plus sûre de son justaucorps, c'est-à-dire dans celle qui s'appuyait sur sa poitrine.

Puis il prit le corps de l'avocat, qui était mort sans presque répandre de sang, la nature de la plaie ayant concentré l'hémorragie au dedans, le replaça dans le lit, la face tournée contre la ruelle, et, rouvrant la porte, appela Gorenflot.

Gorenflot entra.

— Comme vous êtes pâle! dit le moine.

— Oui, dit Chicot; les derniers moments de ce pauvre homme m'ont causé quelque émotion.

— Il est donc mort? demanda Gorenflot.

— Il y a tout lieu de le croire, répondit Chicot.

— Il se portait si bien tout à l'heure!

— Trop bien. Il a voulu manger des choses difficiles à digérer, et, comme Anacréon, il est mort pour avoir avalé de travers.

— Oh! oh! dit Gorenflot, le coquin qui voulait m'étrangler, moi, un homme d'Église; voilà ce qui lui aura porté malheur.

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