III.18. Le Maître dit : « Envers mon prince j’observe exactement tous les rites. Les hommes m’accusent de flatterie, parce qu’eux-mêmes servent le prince négligemment. »
III.19. Ting¹, prince de Lou, demanda comment un prince devait conduire ses sujets, et comment les sujets devaient obéir à leur prince. Confucius répondit : « Le prince doit commander à ses sujets selon les prescriptions, et les sujets doivent lui obéir avec fidélité. »
III.20. Le Maître dit : « L’ode Les Mouettes [12], exprime la joie et non la licence, la douleur et non l’abattement. »
III.21. Ngai, prince de Lou, ayant interrogé Tsai Ngo au sujet des autels élevés en l’honneur de la Terre, Tsai Ngo répondit : « Les Hia y plantaient des pins, et les [Chang]-In, des cyprès. Les Tcheou y plantent des châtaigniers [13], afin d’inspirer au peuple la crainte et la terreur. »
Le Maître entendant ces paroles dit : « Rien ne sert de parler des choses qui sont déjà accomplies, ni de faire des remontrances sur celles qui sont déjà très avancées, ni de blâmer ce qui est passé. »
Tsai Ngo, nommé lu, était disciple de Confucius. Les anciens plantaient auprès des autels érigés à la Terre les arbres qui convenaient le mieux au terrain. Tsai Ngo avait mal interprété leur intention et prêté aux princes actuellement régnants le désir de châtier et de mettre à mort leurs sujets. Confucius l’en reprit sévèrement, et lui marqua plusieurs choses dont il ne convenait pas de parler.
III.22. Le Maître dit : « Que Kouan Tchoung a l’esprit étroit ! » Quelqu’un demanda si Kouan Tchoung était trop parcimonieux. Confucius répondit : « Le chef de la famille Kouan a élevé à grands frais la tour de San kouei [14]; dans sa maison aucun officier n’est chargé de deux emplois. Comment pourrait-on le croire trop économe ? – Mais, reprit l’interlocuteur, s’il fait tant de dépenses, n’est-ce pas parce qu’il connaît les convenances ? » Confucius répliqua : « Les princes ont une cloison devant la porte de leurs palais [15]; le chef de la famille Kouan a aussi une cloison devant sa porte. Quand les princes ont une entrevue amicale, ils ont une crédence sur laquelle on renverse les coupes ; Kouan Tchoung a une crédence semblable. Si le chef de la famille Kouan connaît les convenances, quel est celui qui ne les connaît pas ? »
Kouan Tchoung, nommé I ou, grand préfet de Ts’i, aida Houan, prince de Ts’i, à établir son autorité sur tous les grands feudataires. Il avait l’esprit étroit, il ne connaissait pas la voie de la grande étude des hommes saints et des sages.
III.23. Le Maître, instruisant le grand maître de musique de Lou, dit : « Les règles de la musique sont faciles à connaître. Les divers instruments commencent par jouer tous ensemble ; ils jouent ensuite d’accord, distinctement et sans interruption, jusqu’à la fin du morceau. »
III.24. Dans la ville de I [16], un officier préposé à la garde des frontières demanda à lui être présenté, en disant : « Chaque fois qu’un homme honorable est venu dans cette ville, il m’a toujours été donné de le voir. » Les disciples, qui avaient suivi Confucius dans son exil, introduisirent cet officier auprès de leur maître. Cet homme dit en se retirant : « Disciples, pourquoi vous affligez-vous de ce que votre maître a perdu sa charge ? Il y a fort longtemps que la Voie n’est plus suivie, ici-bas. Mais le Ciel va donner au peuple en ce grand homme un héraut de la vérité [17]. »
Il y avait deux sortes de clochettes. L’une, à battant de métal, servait pour les affaires militaires. L’autre, à battant de bois, servait à l’officier chargé d’enseigner ou d’avertir le peuple.
III.25. Le Maître disait que les Chants du Successeur étaient tout à fait beaux et doux ; que les Chants du Guerrier étaient tout à fait beaux, mais non tout à fait doux.
Les chants de Chouenn¹ sont appelés les Chants du Successeur, parce qu’il succéda à l’empereur Iao², et comme lui, gouverna parfaitement. Les chants du roi Ou³ sont nommés les Chants du Guerrier, parce qu’ils célèbrent les exploits du roi Ou, qui délivra le peuple de la tyrannie de Tcheou¹¹. Les Chants du Successeur sont au nombre de neuf, parce qu’il y eut neuf péripéties ; les Chants du Guerrier sont au nombre de six, parce qu’il y eut six péripéties.
11. Tcheou, dernier souverain de la dynastie des Chang-ln (1766-1122 av. J.-C.), fut renversé par le roi Ou qui instaura la nouvelle dynastie des Tcheou (1121-256 av. J.-C.) (MBC).
III.26. Le Maître dit : « Comment souffrirais-je le spectacle d’un homme qui exerce une haute autorité avec un cœur étroit, qui s’acquitte d’une cérémonie sans respect, ou qui, à la mort de son père ou de sa mère, est sans douleur ? »
IV.1. Le Maître dit : « Il est bon d’habiter là où règne le sens de l’humanité. Pourrait-on appeler sage un homme qui choisirait de n’y point habiter ? »
IV.2. Le Maître dit : « Un homme dépourvu d’humanité ne peut demeurer longtemps dans le malheur ou dans le bonheur. L’homme honorable trouve la paix dans la vertu d’humanité ; l’homme sage en connaît tout le profit. »
IV.3. Le Maître dit : « Seul l’homme honorable sait aimer et haïr les hommes comme il convient. »
IV.4. Le Maître dit : « Celui qui s’applique sérieusement à cultiver la vertu d’humanité s’abstient de mal faire. »
IV.5. Le Maître dit : « Les richesses et les honneurs sont très ambitionnés des hommes ; si vous ne pouvez les obtenir qu’en sacrifiant vos principes, ne les acceptez pas. La pauvreté et l’abjection sont en horreur aux hommes ; si elles vous viennent, même sans aucune faute de votre part, ne les fuyez pas. Si l’homme honorable abandonne la voie de la vertu, comment soutiendra-t-il son titre d’“honorable” ? L’homme honorable ne l’abandonne jamais, pas même le temps d’un repas. Il y demeure toujours, même au milieu des affaires les plus pressantes, même au milieu des plus grands troubles. »
IV.6. Le Maître dit : « je n’ai pas encore vu un homme qui aimât la vertu et haït sincèrement l’inhumanité. Celui qui aime la vertu la préfère à toute autre chose ; celui qui hait sincèrement l’inhumanité cultive la vertu, et fuit toute atteinte du mal. Est-il un homme qui travaille de toutes ses forces à pratiquer la vertu un jour entier ? Je n’ai jamais vu aucun homme qui n’eût pas assez de forces pour le faire. Peut-être en existe-t-il ; mais je n’en ai jamais vu. »
Tout homme, s’il fait des efforts sérieux, peut atteindre la perfection.
IV.7. Le Maître dit : « Chaque classe d’hommes tombe dans un excès qui lui est particulier. On peut connaître le sens humain d’un homme en observant ses défauts. »
L’homme honorable excède toujours en libéralité, et l’homme de peu, en parcimonie ; l’homme honorable, en bienfaisance, et l’homme de peu, en dureté de cœur. En voyant les défauts d’un homme, on peut connaître s’il a le sens de l’humanité ou non.
IV.8. Le Maître dit : « Celui qui le matin a compris la Voie, le soir peut mourir content. »
IV.9. Le Maître dit : « Un gentilhomme qui tend vers la Voie, s’il rougit d’un vêtement grossier et d’une nourriture ordinaire, ne mérite pas de recevoir mes enseignements. »
IV.10. Le Maître dit : « Dans le gouvernement d’ici-bas, l’homme honorable ne veut ni ne rejette rien avec opiniâtreté. La justice est sa règle. »
IV.11. Le Maître dit : « L’homme honorable aspire à la perfection, et l’homme de peu, à la terre ; l’homme honorable s’attache à observer les lois, et l’homme de peu, à s’attirer des faveurs. »
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