Vernor Vinge - Un feu sur l'abîme

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Un feu sur l'abîme: краткое содержание, описание и аннотация

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Un feu sur l’abîme Une expédition straumlienne, explorant une Archive dans la presque Transcendance, a déchaîné une Perversion sur la galaxie entière. Un unique navire est parvenu à fuir dans la nuit épouvantable. À travers l’espace, il fonce vers le centre de la galaxie, vers Les Lenteurs où l’on ne peut pas dépasser la vitesse de la lumière, où les systèmes informatiques les plus performants — même les si lentes intelligences biologiques — subissent une perte de leurs facultés. Il cherche un monde où se poser.
Les deux seuls survivants de l’expédition détiennent sans le savoir la clé du salut de millions de civilisations, dont certaines sont bien plus anciennes que l’humanité : ce sont deux enfants, Johanna et Jefri, abandonnés à eux-mêmes sur un monde médiéval, dont les conflits et les cruautés ne le cèdent en rien à ceux de la galaxie.
Et ceux qui voudraient les aider, et sauver du même coup la galaxie civilisée, se trouvent encore à des milliers d’années-lumière…
Un feu sur l’abîme

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Acier traversa une vaste salle d’une centaine de mètres de large, au plafond voûté soutenu par des dizaines de piliers de pierre. De chaque côté, il y avait des parois noires mobiles, montées sur roulettes. La salle pouvait prendre n’importe quelle forme, comme un labyrinthe. Flenser y avait fait des expériences avec toutes les postures de pensée. Durant les siècles qui l’avaient précédé, on ne connaissait qu’un petit nombre de postures effectives : têtes jointes instinctivement, cercle de sentinelles et différentes postures de travail. Flenser en avait essayé des dizaines d’autres. Étoiles, doubles cercles, treillis et ainsi de suite. La plupart étaient inefficaces et déroutantes. Dans la posture en étoile, seul un membre pouvait entendre tous les autres, qui n’entendaient que lui. Toutes les pensées devaient passer par le point central. Le membre qui occupait ce point ne pouvait rien apporter de rationnel aux autres, et ses erreurs de conception leur étaient transmises sans aucun contrôle. Le résultat était une pagaille analogue à l’ivresse. Naturellement, le monde extérieur n’avait pas tardé à être mis au courant de l’expérience.

Mais il y en avait au moins une autre, jusque-là tenue secrète, qui avait donné des résultats étrangement encourageants. Flenser avait eu l’idée de répartir huit meutes tout autour de la salle, sur des plates-formes provisoires isolées les unes des autres par les partitions mobiles. Il avait alors mis un membre de chaque meute en relation avec des récepteurs appartenant à trois meutes, créant ainsi, en quelque sorte, une supermeute de huit groupes. Acier expérimentait toujours avec ce système. Si les membres connecteurs avaient une compatibilité suffisante (et c’était cela le plus difficile à obtenir), la supermeute était bien supérieure au cercle de sentinelles. Dans la plupart des cas, elle n’était pas plus intelligente qu’une simple meute à têtes jointes, mais il arrivait que des coups de génie en sortent. Avant son départ pour les Longs Lacs, le Maître avait conçu un plan pour reconstruire la salle principale du château afin que les séances du conseil puissent être tenues dans cette posture. Mais Acier n’avait pas donné suite au projet. C’était un peu trop risqué pour lui. Sa domination sur les autres n’était pas tout à fait aussi complète que l’avait été celle de Flenser.

Cela n’avait pas beaucoup d’importance, au demeurant. Il avait d’autres projets plus cruciaux. Les salles qui étaient devant lui formaient le véritable cœur du Mouvement. L’âme de messire Acier était née ici. Toutes les plus grandes créations de Flenser avaient débuté ici. Durant les cinq dernières années, Acier n’avait fait que reprendre la tradition. Il l’avait même améliorée…

Il prit un couloir qui reliait les différentes salles. Chacune était affectée d’un numéro incrusté en or. Il ouvrit les portes l’une après l’autre en s’avançant partiellement à l’intérieur. Ses collaborateurs laissaient toujours leur rapport du dijour précédent juste à l’entrée. Il parcourut rapidement chaque compte rendu avant de se pencher sur la balustrade pour observer le sujet à l’intérieur. Les balustrades étaient protégées. Elles permettaient de voir sans être vu.

La seule faiblesse de Flenser (de l’avis de messire Acier) était son désir de créer un être supérieur. La confiance du Maître était illimitée. Il était persuadé que chaque réussite pouvait être aussitôt appliquée à son âme individuelle. Mais Acier n’entretenait pas de telles illusions. Traditionnellement, les maîtres étaient dépassés par leurs créations, qu’elles soient disciples, produits de fission, membres adoptés ou n’importe quoi d’autre. Lui, Acier, en était la parfaite illustration, même si le Maître ne s’en était pas encore rendu compte.

Acier avait décidé de créer des êtres qui seraient supérieurs chacun à sa manière, mais dans un seul domaine. Pour le reste, ils seraient fragiles et malléables. En l’absence du Maître, il avait entrepris un certain nombre d’expériences en partant de zéro et en identifiant des lignes de filiation indépendantes de l’appartenance à une meute. Ses agents achetaient ou volaient des chiots qui leur semblaient posséder un certain potentiel. Contrairement à Flenser, qui incorporait habituellement les jeunes membres à des meutes existantes d’une manière qui imitait plus ou moins la nature, Acier faisait des siens des nouveau-nés complets. Ses meutes de chiots ne possédaient ni souvenir ni fragment d’âme. Acier les contrôlait entièrement depuis le début.

Naturellement, ces assemblages, la plupart du temps, mouraient très rapidement. Il fallait séparer les chiots de leurs nourrices avant qu’ils ne commencent à participer à une conscience d’adulte. La meute qui en résultait était éduquée entièrement par la parole et par l’écriture. Cela permettait de vérifier efficacement tous les apports.

Il s’arrêta devant la porte 33. Sujet Amdiranifani. Surdoué en mathématiques. Ce n’était pas le seul essai dans cette direction, mais c’était de loin le plus concluant. Les agents de messire Acier avaient cherché dans tout le Mouvement des meutes ayant des capacités d’abstraction. Ils étaient même allés plus loin. Le plus célèbre mathématicien du monde habitait dans la République des Longs Lacs. Sa meute s’apprêtait à fissionner. Elle avait eu plusieurs chiots par elle-même, plus un amant doué pour les maths. Acier avait fait enlever les chiots. Ils allaient si bien avec ses autres acquisitions qu’il avait décidé de créer un octo. Si tout marchait bien, la nouvelle meute serait peut-être d’une intelligence exceptionnelle.

Acier fit signe au garde d’écarter les torches. Il ouvrit la porte 33 et avança sans bruit l’un de ses membres jusqu’à la rampe, où il pencha la tête pour regarder vers le bas en prenant bien soin de faire taire son tympan antérieur. Il n’y avait pas beaucoup de lumière, mais c’était suffisant pour distinguer les chiots serrés les uns contre les autres… avec leur nouvel ami. La mante. Donduciel, il ne pouvait pas lui trouver de meilleur nom. C’était la récompense du chercheur qui a travaillé dur pendant longtemps et avec suffisamment d’opiniâtreté. Il avait eu deux problèmes distincts. Le premier ne cessait de s’amplifier depuis un an. Amdiranifani était en train de s’étioler lentement. Ses membres tombaient dans l’autisme habituel des meutes complètement nouvelles. Et le second problème était celui de la créature capturée. Elle représentait une grande menace, un énorme mystère et une occasion formidable. Comment faire pour communiquer avec elle ? Sans communication, les possibilités de manipulation étaient très limitées.

Pourtant, par un coup de hasard aveugle, un Serviteur incompétent avait montré la voie pour résoudre les deux problèmes à la fois. Maintenant que sa vision s’était adaptée à la pénombre, Acier apercevait la créature des étoiles au milieu des chiots. La première fois qu’il avait entendu dire que le monstre était enfermé avec des sujets d’expérience, Acier était entré dans une rage folle. Le Serviteur qui avait commis l’erreur avait été recyclé, mais plusieurs jours avaient déjà passé. Le sujet Amdiranifani avait manifesté plus d’activité que jamais depuis que ses chiots avaient été sevrés. Et il était devenu évident, après les dissections des autres créatures des étoiles et l’observation attentive de celle qui était ici, que leur espèce n’était pas organisée en meutes. Acier avait mis la main sur un individu au complet.

La créature remua dans son sommeil et émit un bruit grave avec sa bouche. Elle était totalement incapable de produire d’autres sons. Les chiots se déplacèrent pour s’adapter à sa nouvelle position. Ils dormaient eux aussi. Leurs pensées se mêlaient vaguement. La partie grave des bruits qu’ils émettaient ressemblait étonnamment à ceux de la créature. Et c’était là le coup de génie. Amdiranifani était en train d’apprendre le langage de la créature. Pour la meute de nouveau-nés, c’était simplement une autre forme de langage intermeutes, et il devenait évident que la mante était bien plus intéressante que les tuteurs qui venaient exercer sur cette galerie. Le Fragment de Flenser affirmait que c’était à cause du contact physique et que les chiots réagissaient face à la créature comme si elle était une mère de substitution malgré le fait qu’il n’émanait d’elle aucune pensée.

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