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Robert Silverberg: Un jeu cruel

Здесь есть возможность читать онлайн «Robert Silverberg: Un jeu cruel» весь текст электронной книги совершенно бесплатно (целиком полную версию). В некоторых случаях присутствует краткое содержание. Город: Paris, год выпуска: 1977, ISBN: 2-277-11800-1, издательство: J'ai Lu, категория: Фантастика и фэнтези / на французском языке. Описание произведения, (предисловие) а так же отзывы посетителей доступны на портале. Библиотека «Либ Кат» — LibCat.ru создана для любителей полистать хорошую книжку и предлагает широкий выбор жанров:

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Robert Silverberg Un jeu cruel

Un jeu cruel: краткое содержание, описание и аннотация

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Duncan Chalk est à la tête d’une entreprise de divertissements florissante, les plus grands sites touristiques lui appartiennent, et il a la particularité de se nourrir des émotions et des souffrances d’autrui. Afin d’assouvir ses appétits et ceux d’un public toujours plus avide d’images-chocs, il met sous les feux des projecteurs deux êtres brisés, deux monstres que tout sépare : Lona Kelvin, une adolescente de dix-sept ans à qui on a prélevé des centaines d’ovules, jeune vierge mère de cent enfants ; Minner Burris, astronaute remodelé, reconstruit de la tête aux pieds par d’impitoyables extraterrestres. De leur rencontre va naître une histoire riche en émotions, à même de satisfaire les besoins des gens normaux, monstres assoiffés de sensations fortes. Ode à la tolérance, critique acerbe de la société du spectacle, histoire d’amour improbable… Avec , grand roman de science-fiction, Robert Silverberg fait preuve, une fois de plus, de son immense talent.

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Robert Silverberg

Un jeu cruel

CAMILLA : Vous devriez vous démasquer, seigneur.

L’ÉTRANGER : Vraiment ?

CASSILDA : Le moment en est venu. Tout le monde, sauf vous, a quitté son déguisement.

L’ÉTRANGER : Je ne porte pas de masque.

CAMILLA (terrifiée, à part, à Cassilda :) Il n’a pas de masque ? Pas de masque ?

The King in Yellow, acte I, scène II.

À Jim et Judy Blish

La chanson que chantaient les neurones

— La douleur est instructive, haleta Duncan Chalk.

Il gravissait les barreaux de cristal du mur est de son cabinet. Très haut au-dessus de lui trônaient son bureau miroitant et le boîtier d’appel incrusté grâce auquel il contrôlait son empire. Il aurait pu effectuer l’ascension sans la moindre peine grâce à un gravitron porteur. Pourtant, tous les matins, il se contraignait à cette escalade.

Toute une suite l’escortait : Leontes d’Amore aux babines mobiles de chimpanzé, Bart Aoudad, Tom Nikolaides, célèbre par ses épaules, d’autres encore. Pourtant, Chalk, une fois encore attentif aux leçons de la douleur, constituait le centre d’attraction du groupe.

Ses chairs tremblotantes frémissaient. La blanche armature du squelette qui les sous-tendait ployait sous l’effort. Trois cents kilos de viande : voilà à quoi se résumait Duncan Chalk. Son gros cœur racorni battait farouchement, insufflant la vie à ses muscles lourds. Chalk montait. Le chemin permettant d’atteindre son trône, douze mètres plus haut, zigzaguait en méandres tortueux, ponctué, ici et là, de champignons thermoluminescents, étoiles d’or émaillées de rouge, dispensatrices de chaleur et de lumière.

Dehors, c’était l’hiver. La neige fraîche parsemait les rues de ses fines volutes. Le ciel plombé commençait à réagir à l’ionisation matinale engendrée par les hauts pylônes.

Chalk ahanait. Il montait.

— L’idiot arrivera dans onze minutes, monsieur, dit Aoudad. Pour sa démonstration.

— Pour le moment, il m’embête, répondit Chalk. N’importe comment, je le verrai.

— On pourrait essayer de le torturer, suggéra le sournois d’Amore de sa voix de velours. Peut-être que ses talents mathématiques y gagneraient en éclat.

Chalk cracha et Leontes d’Amore se rétracta comme au contact d’un jet d’acide.

L’ascension continuait. Mains blêmes agrippant les échelons scintillants, muscles palpitants qui protestaient sous les couches de graisse qui les enrobaient, Chalk s’élevait le long du mur, s’arrêtant à peine pour se reposer.

Les messages de la douleur qui lui donnaient le vertige le remplissaient de délices. D’ordinaire, il préférait souffrir par personnes interposées, mais c’était le matin et la muraille était un défi qu’il ne pouvait pas ne pas relever.

Il montait. Il montait. Vers le siège de sa puissance. Il grimpait de barreau en barreau. Son cœur protestait, ses entrailles ballottaient dans leur fourreau de chair, ses reins palpitaient, ses os fléchissaient, ployaient sous leur fardeau.

Autour de lui, les chacals au regard étincelant étaient à l’affût. Et s’il tombait ? Il faudrait dix hommes pour le relever et le remettre en piste. Et si son cœur soumis à un effort exténuant fibrillait et déclarait forfait ? Et si ses yeux devenaient vitreux ?

Se réjouiraient-ils en voyant se volatiliser sa puissance ? Jubileraient-ils en le voyant lâcher prise ? En voyant mollir la poigne d’acier qui les broyait ?

Bien sûr. Bien sûr. Un sourire glacé retroussa les lèvres étroites de Chalk. C’étaient les lèvres d’un maigre, d’un Bédouin racorni par le soleil. Pourquoi n’étaient-elles pas épaisses et flasques ?

Il était arrivé à la hauteur du seizième échelon. Il l’agrippa. Chacun de ses pores bouillonnait de sueur. Il resta un moment en équilibre instable, s’efforçant péniblement de transférer le poids de son corps de la pointe de son pied gauche au talon de son pied droit. Être le pied de Duncan Chalk n’était pas une sinécure. L’espace d’un instant, une tension presque incommensurable s’exerça sur sa cheville droite. Enfin, il se pencha en avant, empoigna le dernier barreau d’un geste d’une farouche brutalité – et son trône l’accueillit joyeusement.

Chalk s’assit et le trône le prit en charge. Des mains activées par des micropiles, enfouies dans les profondeurs du rembourrage, s’ouvrirent et se refermèrent, apaisantes. D’intangibles filaments spongieux s’insinuèrent à travers ses vêtements pour étancher la sueur qui humectait les creux et les protubérances de sa chair. Des aiguilles cachées perforèrent l’épithélium, crachant des jets de liquides lénifiants. Le tumulte de son cœur surmené s’apaisa pour ne plus être qu’un murmure régulier. Ses muscles, noués et contractés par la fatigue, se relâchèrent.

Chalk sourit. Une journée nouvelle avait commencé. Tout allait bien.

— Je suis stupéfait par l’aisance avec laquelle vous avez fait l’escalade, dit Leontes d’Amore.

— Vous pensez que je suis trop gros pour bouger ?

— Monsieur, je…

— La fascination de la difficulté ! laissa tomber Chalk. C’est elle qui fait tourner le monde.

— Je vais chercher l’idiot, annonça d’Amore.

— Le savant idiot, le corrigea Chalk. Les idiots ne m’intéressent pas.

— Bien sûr. Le savant idiot… bien sûr.

D’Amore s’engouffra à travers le diaphragme qui s’ouvrait dans le mur du fond.

Chalk se carra sur son siège et croisa les bras sur la rotondité sans faille de sa poitrine et de son ventre. Son regard balaya la pièce immense et le profond gouffre où flottaient des vers luisants. Il avait une vieille tendresse pour les organismes lumineux. Que la lumière soit, qu’elle soit, qu’elle soit. S’il en avait eu le loisir, peut-être aurait-il trouvé le moyen de se rendre lui-même lumineux.

Très loin au-dessous de la salle où Chalk avait inauguré la journée par son escalade quotidienne, des silhouettes affairées allaient et venaient, s’entrecroisaient, toutes à son service. À gauche et à droite, d’autres bureaux se succédaient, tissant une toile d’araignée rayonnant à l’intérieur de l’édifice octogonal dont son bureau était le pôle. Il avait édifié une remarquable organisation. Il s’était taillé dans l’immensité d’un univers indifférent un confortable royaume personnel. Le monde, en effet, persistait à trouver son plaisir dans la souffrance. Certes, les morbides et délicieux frissons distillés par les massacres collectifs, les guerres, les accidents d’avions, etc, appartenaient désormais au passé, ou presque. Cependant, Chalk était à même de fournir aux amateurs de ce genre de délectations des substituts plus puissants, plus extrêmes et plus directs. Même maintenant, il ne ménageait pas ses efforts pour procurer du plaisir au plus grand nombre, infliger la souffrance à quelques-uns et jouir lui-même à la fois du plaisir et de la souffrance.

Le hasard présidant aux combinaisons génétiques l’avait désigné pour cette tâche unique. Il répondait à la douleur, il se nourrissait de la douleur. Absorber la détresse d’autrui à l’état brut lui était aussi nécessaire que le pain et la viande pour les autres. Personnification suprême des goûts de son vaste public, il était parfaitement en mesure d’assouvir les besoins profonds de celui-ci. Mais, bien que sa capacité se fût émoussée au fil des ans, il n’était pas encore blasé. À présent, il se frayait son chemin à travers les orgies émotionnelles dont il était l’organisateur, en savourant une bouchée sensorielle par-ci, une gorgée sanglante par-là, mais veillant à garder assez d’appétit pour de plus grotesques permutations de cruauté, toujours en quête de sensations nouvelles et terriblement anciennes.

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