Éric Chevillard - La nébuleuse du Crabe

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1993 Prix Fénéon de Littérature
La première fois que Crab fut pris pour un éléphant, il se contenta de hausser les épaules et passa son chemin. La deuxième fois que Crab fut pris pour un éléphant, il laissa échapper un geste de mauvaise humeur. La troisième fois, enfin, devinant que ses ennemis avaient comploté de le rendre fou, il ceintura vivement l'insolent et l'envoya valser à dix-huit mètres de là… Tel est Crab, dont ce livre voudrait rapporter quelques gestes remarquables et que l'on verra ainsi avec un peu de chance plier le ciel comme un drap ou se tuer par inadvertance en croyant poignarder son jumeau, puis devenir torrent pour mieux suivre sa pente. À moins évidemment qu'il ne se terre plutôt tout du long dans son antre obscur, s'agissant de Crab, on ne peut rien promettre.

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A la naissance, petit vieillard prématuré, très affaibli et désarmé, Crab ne pesait déjà plus que deux kilos cinq cents. La bévue d'une infirmière de l'hôpital est donc bien excusable qui l'arracha à sa couveuse pour le reconduire en le sermonnant au service de gériatrie d'où elle le croyait échappé – et si vous recommencez, je vous enferme. Crab ne bougea plus. Il prit de l'âge, ce qui évidemment n'était pas fait pour dissiper le malentendu, au contraire, on s'étonnait seulement de son extraordinaire longévité – tandis que ses voisins de lit s'éteignaient pour la plupart quelques jours seulement après leur arrivée, Crab résistait inexplicablement, les médecins étaient chaque matin stupéfaits de le retrouver en vie et l'hypothèse de son immortalité fut même évoquée du bout des lèvres.

A l'entendre, pourtant, Crab était un mourant aussi mal en point que les autres. Ayant appris le langage des hommes en écoutant délirer ses compagnons, il récitait bout à bout leurs monologues désespérés, sans les comprendre, il les reprenait à son compte, d'une voix blanche, il insultait Dieu, reniait ses fils, appelait sa mère, maudissait l'ombre d'un chef de bureau, pardonnait tout en revanche à une certaine Louise, ou Suzanne, énumérait cent prénoms de femmes, chevrotait des sentences et maximes morales, et des formules chimiques, parfois légèrement saugrenues et poétiques, réclamait un prêtre, un notaire, vite, racontait des épisodes glorieux ou sanglants d'un autre siècle, c'étaient bien là des phrases d'agonisant. Il n'en avait plus pour longtemps.

Mais les années passaient, on changeait trois fois par semaine le cadavre du lit voisin, les médecins aussi se succédaient, atteints par la limite d'âge, échouaient quelquefois dans cette même chambre, rassemblant alors leurs dernières forces, ils demandaient à Crab son secret, par pitié, et Crab sans se faire prier avouait tout, il reconnaissait avoir assassiné une certaine Suzanne, ou Louise, et trahi son pays, enfoui un magot, engendré une multitude d'enfants naturels, saboté les freins de son chef de bureau, dérobé le ruban de Mlle Portal et même, oui, brisé le peigne de Mlle Lambercier… mais plus personne ne l'écoutait.

Un jour enfin le mystère trouva son explication. On mit la main sur un registre ancien qui prouvait l'erreur initiale de l'infirmière, et Crab, alors âgé effectivement de quatre-vingt-sept ans, réintégra sa couveuse où lui furent prodigués en urgence les soins que nécessitait son état, car le pauvre enfant inspirait les plus vives inquiétudes, si faible, si chétif, on ignore aujourd'hui s'il fut finalement sauvé, ou non.

*

Crab n'oublie jamais les cimetières dans lesquels il a été enterré.

49

Crab se traîne pitoyablement depuis que les ressorts de ses jambes ne fonctionnent plus. Certains ont même crevé la peau des cuisses et des mollets. Dans ces conditions, le moindre déplacement tourne au supplice. Si au moins Crab pouvait prendre appui sur ses bras pour avancer, mais pas question. Quand le malheur distingue un homme, il le veut tout à lui. Vit-on jamais un paralytique figé dans une pose voluptueuse? La maladie attend pour le frapper qu'il soit assis inconfortablement. Crab ne doit pas compter sur ses bras. La paille perce déjà en plusieurs endroits, à la hauteur du coude gauche, de l'épaule droite.

*

Crab vide sa pipe – cogne doucement le fourneau renversé contre le bord du cendrler où les cendres en effet lentement s'amoncellent, tandis que la jambe gauche de Crab raccourcit, c'est un fait, et le cendrier puis la table basse disparaissent bientôt sous les cendres que Crab, déjà très diminué et diminuant, diminuant à vue d'œil, continue cependant à extraire de sa pipe et qui forment autour de lui un tapis de plus en plus épais, ou profond, sur lequel bouge encore un bras, un avant-bras plutôt, une main, juste deux doigts secouant une pipe pour en faire tomber les dernières cendres, les cendres grises et légères, d'un gris léger, qui recouvrent maintenant le sol de cette chambre où l'on chercherait en vain une trace de Crab et de sa pipe.

50

Le formulaire passe de mains en mains, chacun veut y coucher sa signature, on se l'arracherait même si l'on ne craignait, ce faisant, de le déchirer, ou simplement de le froisser, ce qui obligerait à reporter l'affaire puisque alors il faudrait bien établir un nouvel acte et le remettre en circulation depuis son lieu de départ initial afin de récupérer les signatures perdues, une collecte de tant d'années réduite à néant, sinistre perspective, aussi chacun en prend-t-il grand soin, on le parcourt du regard juste pour vérifier qu'il n'y a pas erreur sur la personne – ce qui entraînerait des conséquences fâcheuses -, on le paraphe en toute connaissance de cause, on le donne à son voisin qui fait de même, ça va très vite, il y aurait déjà plusieurs millions de signatures, voire trois ou quatre milliards au bas de ce formulaire spécialement imprimé pour l'occasion sur un énorme rouleau de parchemin qui sera expédié en Asie, dès son retour d'Afrique, en sorte que réellement tout le monde aura signé le PERMIS D'INHUMER Crab.

*

Crab est étendu sur le dos, quatre cierges brûlent aux quatre coins de son lit – moi aussi, j'aurai quatre ans demain, lui confie un petit garçon qui n'obtient pas de réponse, grimpe sur une chaise et souffle les bougies, puis s'en va, cherchant une explication au silence inquiétant de Crab, sa figure trop longue, sa pâleur, sa raideur. Mais il comprend soudain, il comprend en apercevant sa mère à la cuisine, par l'entrebâillement de la porte, qui verse de la mort-aux-rats dans la pâte de son gâteau d'anniversaire.

*

C'est au chevet des morts que sont prononcées les phrases qui manquent le plus gravement aux règles de la concordance des temps. On parle entre nous de Crab comme s'il était encore de ce monde, mais brutalement la triste réalité s'impose et notre parole s'embrouille, prise de confusion, s'applique à ne plus recourir qu'aux temps du passé, cette fois avec tant d'insistance qu'elle semble se souvenir d'un ancêtre antédiluvien qui pourrait être le père du singe, alors que ce cadavre-là est encore chaud, humide, et rêveur. Ou bien, c'est le contraire, on attaque comme il faut la complainte à l'imparfait – Crab était le meilleur d'entre nous -, puis l'émotion nous fait trébucher, la vérité est inadmissible, il ne peut pas être mort – lui qui aime tant les livres et les oiseaux -, d'ailleurs nous souffrons par sa faute comme s'il nous tapait dessus de toutes ses forces, Crab nous plie en deux, nous jette à terre, nous tord les bras, à certains il arrache même les cheveux, jamais un mort ne montrerait une telle agressivité. Bien sûr, cette fois encore, la douleur trop présente, trop active, a renversé les perspectives, on s'en avise en frissonnant, on se reprend – il aimait tant les livres et les oiseaux. Pendant quelques minutes, on parle de Crab au passé, on célèbre dignement sa mémoire, mais cela ne dure pas, à nouveau le présent et l'imparfait se bousculent sur nos lèvres, s'accrochent, et le futur n'est pas en reste, puisque notre malheureux ami sera toujours vivant.

*

Crab est mort parfaitement inconnu, dénué de tout, dans la plus noire misère. Bien des années ont passé, son nom est devenu glorieux, et du même coup sa situation matérielle s'est grandement améliorée.

*

Par crainte d'être enterré vivant et de reprendre connaissance dans la tombe – ce qui arrive quelquefois, suite à un diagnostic défaitiste -, Crab fit procéder à l'incinération de sa dépouille, si bien qu'il était en cendres lorsqu'il sortit enfin de cette torpeur comateuse que l'on avait à tort crue définitive, prisonnier d'une urne exiguë, sans moyen de communiquer avec l'extérieur et démuni de tout. Vainement sa conscience essaya de remobiliser ses énergies éparses, de se rassembler pour former un cri, ou mieux encore, un poing avec lequel briser de l'intérieur le vase funéraire. Mais un corps en poudre n'obéit plus comme avant aux moindres injonctions de la volonté, se laisse aller à l'indolence, il est bien là où il est tel qu'il est, hors de ses os, délié de sa posture crucifiante, sans besoin, tout désir refroidi.

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